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Le pont des Français. — Dessin de E. Dardoize, d’après une photographie de M. E. de Greslan.


VOYAGE À LA NOUVELLE-CALÉDONIE,


PAR M. JULES GARNIER, INGÉNIEUR CIVIL DES MINES[1].


1863-1866. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


XVI


Excursions au nord et à l’ouest de Nouméa.

Après quelques semaines passées dans le chef-lieu pour y classer les échantillons minéralogiques que j’avais rapportés du nord de l’île, je recommençai autour de Nouméa une série d’excursions ayant pour but de relier mes travaux précédents à ceux que j’avais l’intention de diriger vers la côte occidentale de l’île. Je revis la route de Koé et Pont-des-Français, élevé en 1859 sur une petite rivière qui est le cours d’eau le plus rapproché de la ville. Bien qu’à dix kilomètres de Nouméa, ce point est ordinairement le but des promenades des citadins, tant ils aspirent à goûter de l’eau vive ; en ce moment même (1868) des marchands transportent cette eau au chef-lieu, où elle se vend, je crois, à raison de cinq francs la barrique.

Je visitai aussi les établissements de la mission de Saint-Louis, fondée en 1850 par le P. Rougeyron, qui y amena du nord de l’île, de Poëbo et de Balade, plus de cent naturels convertis au christianisme ; ils s’établirent dans la spacieuse plaine de Saint-Louis, par laquelle la presqu’île de Nouméa se rattache au sol calédonien, et c’est là que je les rencontrai, eux et leurs descendants. En arrivant sur le territoire de la mission, on rencontre d’abord la Conception, résidence du provicaire apostolique. Cet établissement, agréablement situé sur un monticule qui domine la mer, est entouré de plantations, de cases indigènes. Au delà de la Conception s’étale en larges ondulations la plaine de Saint-Louis, où les bœufs de la mission pâturent en nombreux troupeaux dans de gras herbages ; au bout d’une heure de marche environ, on arrive à la mission proprement dite. Elle s’élève sur une éminence. Les Pères, au nombre de trois ordinairement, ont des logements spacieux et bien distribués ; la plaine qui s’étend au pied de cette habitation est parfaitement arrosée et cultivée ; elle se termine à la mer par une anse bien abritée ; la rivière de Saint-Louis met en mouvement, par une roue hydraulique puissante, une scierie destinée à débiter les magnifiques futaies qui couvrent les flancs des montagnes voisines ; les planches sorties de cette usine sont livrées au commerce de Nouméa, qui leur trouve toujours un débouché facile dans les constructions de la colonie.

Au moment de mon passage, les missionnaires achevaient une belle goëlette de cent cinquante tonneaux environ, toute construite avec les bois de leurs montagnes.

  1. Suite. — Voy. t. XVI, p. 155 et suiv. ; t. XVIII, p. 1.