Page:Le Tour du monde - 18.djvu/108

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des familles qui patronnent cette bonzerie et les prêtres qui la desservent précèdent et suivent le char, accompagnés de coulies qui portent les coffrets et les paniers renfermant les ustensiles et les autres objets sacrés du temple.

Le Tohiéïsan, l’un des grands temples du Taïkoun, célèbre sa procession annuelle le deuxième jour du dixième mois (décembre-janvier). Les bonzes, à leur retour, font lecture au peuple de certains fragments des livres sacrés ; ils lui servent à boire du thé préparé et béni de leurs mains, et lui ouvre libéralement les jardins et le bois sacré qui font partie des dépendances du couvent. Le septième jour est consacré a des pantomimes sur des sujets tirés de l’ancienne histoire du Nippon.

Dans la grande procession bisannuelle du temple du Kanda-Miôdjin, il y a toute une cavalcade de personnages historiques, parmi lesquels on distingue Taïkosama.

Pour donner plus de relief encore à la parade, les bonzes y invitent un certain nombre de courtisanes, qui figurent au cortége, portées dans d’élégants palanquins.


Le char de triomphe du saint de Miôdjin. — Dessin de L. Crépon, d’après une gravure japonaise.

Le char du saint de Miôdjin est traîné par deux buffles et par un nombre illimité de fidèles, volontairement attelés aux cordes de paille du sacré véhicule. À quelques pas en arrière de celui-ci, on porte sur un plateau la tête hideuse et colossale du démon dont le saint a triomphé. Les bonnes gens du peuple en contemplent avec effroi les cornes gigantesques, la crinière ébouriffée ; ils se montrent les uns aux autres ses yeux sanglants, sa peau d’écarlate, son horrible mâchoire. Pour ajouter à l’effet du spectacle, des bonzes, à quelques pas en arrière, sonnent de la conque et en tirent de lugubres hurlements. Un peu plus loin, on exhibe la hache énorme au moyen de laquelle le héros victorieux fit tomber la tête du monstre.

Mais toutes les merveilles réunies de la procession de Miôdjin pâlissent devant les splendeurs de la fête que donnent annuellement les prêtres du temple de Sannoô, consacré à la mémoire de Zinmou, le fondateur de l’empire du grand Nippon. C’est la plus imposante des matsouris de Yédo. Elle a lieu le quinzième jour du sixième mois.

Tengou, le fidèle portier et messager des dieux, ouvre la marche. Paré de son plus beau costume de héraut céleste, il déploie à demi une paire de grandes ailes aux couleurs de l’iris. Son air souriant, ses yeux malins, son teint cramoisi, son nez d’une longueur démesurée, disposent le peuple à la gaieté et assurent au cortége l’accueil le plus sympathique. Lorsque les mauvais esprits aperçoivent l’image de Tengou à la porte