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plus piquant. Dans certaines localités, on ajoute quelques essences à ce fromage, et on l’enferme dans des étuis d’écorce de sapin, qui lui donnent une saveur assez agréable ; on l’appelle brândza de cochuletz.

La laine de tonte, qui n’est pas exportée à l’état brut, est transformée, dans l’intérieur même du pays, en divers tapis et étoffes, fabriqués par les paysans, sur leurs métiers rustiques, ou bien dans quelques manufactures où se travaillent des draps, des couvertures et autres articles. Presque chaque maison de paysan renferme une petite pièce réservée au métier, sur lequel la femme tisse, pendant les mois d’hiver, la toile, le drap, les tentures et les tapis dont la famille peut avoir besoin. L’abondance de pareilles étoffes est un indice particulier d’aisance et de bien-être.

Le mobilier des paysans se réduit presque toujours à de grands lits plats fixés au sol et occupant un ou deux côtés de la chambre ; on recouvre cette espèce de large banc avec des nattes ou des tapis épais ; aux extrémités, on entasse des coussins recouverts de diverses étoffes de laine ; quelquefois même on étend sur le tout un vaste couvre-pied dont les franges retombent jusque sur le sol.

Dans la gorge de la Bistriza. — Dessin de Lancelot.

Les étoffes employées pour recouvrir les coussins ou pour servir de couvre-pied s’appellent cadrile et chrame. Celle-ci est toujours d’une couleur uniforme, rouge, verte ou blanche, mais ses fils, qui sont rehaussés comme dans le velours épinglé, et tordus à chaque maille, lui donnent l’aspect d’une toison très-fournie ; l’autre est un tissu souple assez fin, formé ordinairement de carreaux rouges et verts. La même étoffe que le cadrile, mais en tissu plus épais et avec des couleurs moins vives (ordinairement des carreaux blancs et noirs), porte le nom de cerga et s’emploie principalement pour recouvrir les voitures. Lorsque la pièce est assez épaisse et assez large pour servir comme tapis, on lui donne le nom de zebleu.

Les laines employées dans toutes ces étoffes ne sont soumises à aucune autre préparation que le lavage et la teinture : aussi tous ces tissus conservent-ils soit une certaine rudesse, soit un peu de graisse.

Les religieuses mettent un soin excessif à tisser, soit avec de la laine blanche ou coloriée en noir et en marron, soit avec de la laine mêlée de soie, toutes les étoffes dont se sert la caste monacale ; elles fabriquent des voiles noirs d’une finesse admirable, que l’on nomme camilafques ; des flanelles, des toiles de laine plus ou moins épaisses et denses qui portent le nom de muhaer ; enfin, des draps épais, noirs ou marrons, pour les couvents d’hommes, ainsi que des bonnets de moines et de prêtres en feutre noir.

Les paysans tissent des draps épais, qu’ils appellent aba ou dimié, et qui sont ordinairement blancs, noirs, marrons ou verts foncés. Ces étoffes, une fois sorties du métier, sont passées au fouloir pour être apprêtées.

Les femmes tissent aussi les larges ceintures en laine dites briu, mais principalement rouges, qui sont universellement portées par les deux sexes, ainsi que les longs cordons en laine brodés de perles et de pail-