Page:Le Tour du monde - 17.djvu/209

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ruines de l’amphithéâtre romain, à Trèves. — Dessin de Stroobant.


TRÈVES ET LA MOSELLE ALLEMANDE,


PAR M. G. PERROT.


1867. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


I


Il était déjà nuit quand le dernier train de Luxembourg nous déposa à la gare de Trèves ; plusieurs omnibus s’y disputaient les rares arrivants. Il y a, nous en fîmes encore l’expérience à notre départ, autant d’omnibus que d’hôtels, mais pas autant de voyageurs que d’omnibus. C’est que, pour gagner Trèves, par le chemin de fer, quand on remonte le Rhin ou qu’on le descend, il faut faire un long détour par Aix-la-Chapelle, Liége et Luxembourg, ou par Neun-Kirchen et Sarrebruck, et on sait ce que c’est qu’un détour multiplié par la lenteur allemande. Sur dix personnes qui visitent la vallée du Rhin, il n’y en a souvent pas une qui se détourne pour voir Trèves. Trèves, en effet, n’est plus aujourd’hui que le chef-lieu d’un département prussien et de la seizième division militaire, une petite ville de province où trois régiments tiennent garnison. On ne trouve pas ici le mouvement de Cologne, de Coblentz ou même de Bonn ; pas d’industrie, pas même d’université ; des rues mornes comme celles de l’une de ces villes qui n’ont plus de raison d’être et qui ne durent que par la force de l’habitude. Pas de théâtre qui mérite ce nom ; il n’y aurait, pour entretenir une troupe, ni un petit souverain mélomane, comme à Carlsruhe, ni une nombreuse et riche société bourgeoise, comme à Cologne. Les officiers, qui tiennent ici le haut du pavé, passent leur temps à dresser des conscrits sur les places et promenades désertes et à étudier, à comparer l’un à l’autre les divers crus de la Moselle en rêvant de Cologne ou de Berlin. Il y a pourtant, nous le savions, mieux à faire à Trèves. Sans parler des environs de la ville, faits à souhait pour le plaisir des yeux, nous voulions voir les importants édifices qu’a conservés cette ancienne cité de la Gaule belgique, cette cité qui fut de fait, pendant un siècle environ, la capitale de l’empire d’Occident.

Il nous fallait attendre le lendemain matin pour courir à la porte Noire, dont l’âge et le caractère ont soulevé tant de discussions parmi les savants ; tout ce