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pièces de leur répertoire, c’est-à-dire les morceaux de déclamation aussi bien que les romances, se compose habituellement d’une ou de deux guitares, d’une sorte de violoncelle que l’on nomme kokiou ou biwâ, selon qu’on l’emploie avec ou sans archet, et enfin du gottô, grande harpe à neuf cordes, tendues dans toute la longueur d’une caisse sonore que l’on couche sur le sol, instrument dont on ne peut jouer qu’en s’adaptant des ongles artificiels en os ou en ivoire, aux trois premiers doigts de la main droite.

Les productions artistiques de ces associations féminines offrent donc un intérêt à la fois dramatique et musical ; et l’effet en est charmant lorsqu’elles ont lieu en plein air, par une belle soirée d’été, dans l’encadrement d’une légère construction de bambou ornée d’une guirlande de lanternes en papier de couleur. C’est un
Interprète japonais en costume de cour. — Dessin de A. de Neuville d’après une photographie.
spectacle dont nous avons été témoins aux abords du grand pont de Yétaï, qui, traversant l’O-Gawa au-dessus du port des jonques marchandes, relie la cité bourgeoise au quartier méridional du Hondjo. Les sons combinés du chant et des instruments dominaient le paisible murmure de la foule des promeneurs. Dans les intervalles de silence nous distinguions au loin le bruit confus des passants qui traversaient le long palier de bois du Yétaï-Bassi. Aucun roulement de voitures, aucune des clameurs discordantes de nos cités d’Europe ne venaient rompre le charme de nos impressions.

Il n’y a en Europe que les quais et les places de la Reine de l’Adriatique qui offrent ce même mouvement de peuple et ce même concert de pas, de voix, de chants et de musique, dont rien ne trouble la paisible cadence et la rêveuse harmonie. L’O-Gawa rappelle le Grand-