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police sont ses pourvoyeurs. Le dépôt réunit vingt à trente prisonniers par salle. Ils portent tous le même costume, un grossier kirimon de cotonnade bleue, sans aucune autre pièce de vêtement. Comme il ne leur est permis ni de se raser, ni de se coiffer, au bout de peu de jours le seul aspect de leur barbe et de leur chevelure les classe dans la catégorie des êtres impurs, pour lesquels on ne saurait éprouver d’autre sentiment que le mépris ou le dégoût. Ils dorment accroupis sur les dalles nues dont la prison est pavée. Toutefois, ceux qui peuvent en faire les frais, obtiennent du geôlier une ou plusieurs nattes et même une couverture ouatée. Le riz est leur unique nourriture. Le silence le plus absolu leur est imposé, et cette règle ne comporte qu’un seul cas d’exception : lorsque l’un des prisonniers a été condamné à mort et que la gendarmerie vient l’enlever à ses compagnons


Famille de marchands. — Dessin de A. de Neuville d’après une photographie.

de captivité, ceux-ci ont le droit de pousser ensemble et de toutes leurs forces, un long cri de désespoir ; puis tout rentre dans un silence plus horrible que jamais.

Les lois de Gonghensama n’admettent que l’emprisonnement accompagné de peines corporelles, ou la mort. Le bannissement peut atteindre les grands de l’empire et les bonzes d’un certain rang. Le gouvernement les déporte dans l’une des îles de Sado, d’Oki, d’Isou et de Fatsisio. L’on dit qu’ils peuvent s’y occuper à tisser de la soie.

Quant à l’emprisonnement, il n’est jamais de longue durée, sauf pendant la prévention. Le jugement peut bien y ajouter quelques semaines ou quelques mois, comme j’en ai vu un exemple à Yokohama, où le coskeï d’un résident européen fut condamné pour vol à une ré-