Page:Le Tour du monde - 16.djvu/33

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

épars et mille sept cent quarante en taillis de vingt-cinq ans et au-dessus ; le reste était couvert de bruyères et de rochers stériles. En 1716 on fit des plantations de chênes sur une très-grande étendue.

Les essais de repeuplement devaient rencontrer encore bien des mécomptes. Par suite du dépérissement des arbres, on fut amené à exploiter en taillis des portions de bois destinées d’abord à devenir des futaies pleines. « Le mal ne se borna pas là, dit un écrivain compétent, car le sol, périodiquement découvert par les coupes, se stérilisa peu à peu, devint de moins en moins propre à la végétation du chêne ; des vides se formèrent de plus en plus grands, et la forêt fut sur le point d’être ramenée à l’état d’où on l’avait tirée au prix de grands sacrifices. »

C’est alors qu’on eut l’idée d’y introduire du pin et d’en repeupler tous les vides et clairières. Les arbres résineux sont de toutes les essences forestières les moins difficiles sur la nature du sol ; il semble qu’ils demandent à la terre moins de la nourriture qu’un point d’appui. Déjà, au milieu du dix-septième siècle, on avait essayé de naturaliser dans la forêt le pin maritime, mais on a reconnu, après plusieurs tentatives, qu’il n’y réussit pas aussi bien que le pin sylvestre. Ce dernier fut introduit par Lemonnier, médecin de Marie-Antoinette, qui fit venir du Nord des plantes et des graines, et les sema sur le rocher d’Avon, près et au sud-est de Fontainebleau.

Sous Louis-Philippe, des semis furent faits sur une très-grande échelle. Aujourd’hui plus de cinq mille hectares de pins, âgés de quinze à trente ans, sont disséminés sur tous les points ; tantôt mêlés aux autres essences forestières, tantôt couvrant seuls de vastes espaces, comme cela a lieu aux gorges d’Apremont, du Houx, etc… C’est le pin sylvestre qui forme la majeure partie de ces repeuplements. On considère les aiguilles qui se détachent et tombent chaque année des branches des pins comme un moyen d’amendement du sol qui le prépare à recevoir des essences supérieures.


Le Long-Rocher. — Dessin de D. Grenet.

Après avoir reconnu les fâcheux effets du régime d’exploitation en taillis, qui stérilise un sol naturellement aussi sec, il paraît qu’on en revient à l’idée de ramener en partie la forêt à l’état de futaie pleine.

« Les quarante mille mètres cubes que produit aujourd’hui la forêt, qui, sur pied, se vendent peut-être quatre cent mille francs, représentant, dit l’auteur que j’ai cité plus haut, au moins un million sur le marché parisien, c’est donc une somme de six cent mille francs qui restent entre les mains du monde de marchands et d’ouvriers qui contribuent d’une façon quelconque à mettre le bois à la portée du consommateur. La conversion en futaie de la forêt de Fontainebleau, en doublant la production en matière, fera donc plus que doubler ou tripler le revenu du propriétaire. » Pour préparer ces nouvelles conditions d’aménagement, de vastes cantons de la forêt, destinés à être replantés ou à recevoir des semis, viennent d’être récemment enclos et fermés de treillages très-serrés, de manière à les mettre à l’abri des bêtes fauves et à empêcher même le passage des petits animaux rongeurs.

On comptait, il y a quelques années, jusqu’à deux mille cerfs ou biches ; le nombre en a diminué. Quant aux sangliers, ils avaient beaucoup diminué sous l’Empire, parce que c’était la chasse favorite de Napoléon. Depuis ils avaient complétement disparu, mais voilà que depuis deux ans ils se sont de nouveau répandus et multipliés dans la forêt de Fontainebleau. On sait quelle est la fécondité de ces animaux. La femelle a deux