saille servant de limite à deux champs ; mais, en revanche, le massif du djebel Belloua s’élève majestueusement entre Tiz-Ouzou et le Sébaou, comme pour protéger le fort contre le vent du nord. Ses flancs boisés, verdoyants et broussaillés reposent l’œil lassé de la monotonie de la vallée ; la riche et vaste smala de Tizi-Ouzou étale ses nombreux gourbis sur les premières pentes du Belloua. Si vous avez un jarret de zouave ou de chasseur de chamois, montez ces pentes rapides et vous serez dédommagé en arrivant au sommet[1] ! »
À sept ou huit kilomètres à l’est de Tizi-Ouzou, nous trouvâmes le village ruiné de Sikhou-Meddour, après avoir traversé à gué les trois bras de l’oued Aïssi, lequel, à l’époque actuelle, apporte très-peu d’eau au Sébaou, dont il est en hiver un des plus considérables affluents. Notre première étape ne dépassa pas Djema-Sah’ridj, village des Beni-Fraoucen, dans lequel Mac-Carthy croit retrouver la Bida-Colonia des Romains. Son nom actuel (la mosquée du bassin) semble faire allusion à son site concave, arrosé de sources abondantes, et son aspect, quand on l’aborde du côté de l’est, est parfaitement en rapport avec les idées que peut susciter la connaissance de son passé.
On aperçoit tout d’abord un grand emplacement jonché
de débris antiques et entouré d’habitations d’un assez
bon aspect ; là se tient le marché, sur un sol où de
nombreux réseaux de murs à fleur de terre attestent
l’occupation romaine. À gauche, on côtoie le bassin en
grandes pierres taillées auquel Djema-el-Sah’ridj
doit son nom : tout autour se dressent un grand nombre
de blocs d’environ un mètre de hauteur sur une largeur
et une épaisseur moindres de moitié. Plusieurs blocs sont
aussi encastrés dans les maisons voisines. Sur l’autre
côté du marché s’élève la mosquée petite et basse, appuyée
à un minaret de modeste apparence, mais pourtant
Djema-Sab’ridj. — Dessin du commandant Duhousset.
d’un bon effet dans le paysage. En poursuivant
vers l’est, on rencontre deux autres fontaines, également
construites en pierre de taille. On arrive enfin
à l’extrémité orientale de la ville, vers une petite butte
sur laquelle se détachent, au milieu des tombes, plusieurs
pans de murs éboulés. Cette butte domine Djema-Sah’ridj
et supportait probablement une citadelle.
La route, presque toujours en plaine, offre peu d’iotérêt jusqu’à cet endroit ; un souvenir pourtant s’y rattache : c’est de là que, en 1857, nos colonnes partirent des trois camps de Sekh ou Meddour, d’El-Hamis et d’Abidchamlat, pour enlever les contre-forts du Djurjura, dont on voit les petits villages se détacher en blanc sur les crêtes escarpées, à la hauteur du dernier de ces camps, un peu à l’ouest du Tleta.
Là, je quittai mes camarades pour ne les rejoindre qu’au rendez-vous du déjeuner, au village de Mahmoud. Je partis avec un guide pour explorer quelques sentiers dont les bords m’offraient la luxuriante végétation de la plaine : une forêt d’aloès et de cactus, mêlant leur feuillage épineux à la verdure un peu plus pâle des énormes oliviers au milieu desquels se cachent Souk et Tleta. Je constatai en passant près de l’endroit où se tient le marché, l’existence de quelques vestiges romains de peu d’importance.
Comme je ne tenais pas à retourner au campement du soir, je couchai au Tleta, et me remis en route le lendemain de bonne heure, pour rejoindre mes compagnons au rendez-vous de midi. Je savais le pays que j’avais à parcourir accidenté et d’un difficile accès, j’étais cependant bien loin de me douter des obstacles de toutes sortes que m’opposerait la petite chaîne qui sépare les Beni-Fraouçen des Beni-Khellili et dont les crêtes atteignent une altitude de mille mètres. Après avoir tra-
- ↑ Revue africaine.