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Le lac Till. — Dessin de M. Stroobant d’après nature.


LA FORÊT-NOIRE,


PAR M. ALFRED MICHIELS[1].


1667. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


II (suite).


Il y a une quarantaine d’années, lorsqu’un voyageur entrait dans une cabane du Schwartzwald, la couleur noire des parois l’étonnait, et il cherchait quelle en pouvait être la cause. Cette teinte obscure avait une origine toute primitive. Les chandelles n’étant point connues sur la montagne, les habitants s’éclairaient avec des baguettes de sapin, fixées au bout d’une tige de fer, que portait un socle de même métal : la fumée communiquait à la maison entière, aux meubles même, une sombre nuance. Mais trop de soleil envahissait la chambre pendant le jour, des oiseaux trop nombreux chantaient sur les rameaux voisins, pour que le montagnard éprouvât des sentiments mélancoliques. Il paraissait vivre dans un chalet de palissandre, au lieu d’habiter une maison de bois blanc ; voilà tout. Il y conservait la gaieté naturelle de l’homme qui n’est point fatigué de relations vaines ou obligatoires, qui laisse la paix du monde extérieur pénétrer jusqu’au fond de son âme, qui écoute, avant de s’endormir, non point de ridicules ou vulgaires propos, mais le majestueux roulement des feuillages et le bruit plus sonore des cascades pendant le silence de la nuit.

Maintenant que la civilisation introduit partout ses délicatesses, les paysans du Schwartzwald brûlent de la chandelle, et même, dans quelques habitations, je crois avoir vu de la bougie !

Le charme principal de ces demeures, c’est leur situation et les magnifiques paysages que l’on découvre

  1. Suite. — Voy. page 209.