Page:Le Tour du monde - 16.djvu/187

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tants que quelques rares indigènes, qui séjournent le long de la mer, là où de nombreux bancs de coraux servant d’abri aux poissons, aux tortues et aux coquillages, leur promettent une pêche facile. C’est à peine s’ils cultivent, à l’embouchure des ruisseaux, quelques portions de cette terre peu généreuse.

Mais si de grands espaces de la Nouvelle-Calédonie offrent ce triste aspect, il en est de plus vastes encore où le paysage est tout différent. On voit alors le pays formé de collines peu élevées et de chaînes de montagnes allongées, aux lignes de faîte horizontales, aux pentes douces, aux croupes arrondies ; tout le sol est couvert d’herbages épais, élevés, au milieu desquels s’élève de distance en distance le tronc blanc de l’utile niaouli ; de nombreux petits ruisseaux circulent entre ces collines, au pied de ces chaînes ; le long de ces cours d’eau se dressent des arbres élevés, de mille essences diverses, au milieu desquels les lianes s’entrecroisent à l’infini. Ici, en nous enfonçant au-dessous de l’épaisse couche d’humus végétal, nous trouverons des roches schisteuses, des calcaires etc., en un mot, et d’une manière générale, toutes les roches autres que les roches serpentineuses éruptives.

Mais un fait digne d’attention est que dans toutes les parties où de grands cours d’eau ont pu déposer leurs alluvions et créer des plaines plus ou moins spacieuses, l’aspect des paysages Néo-Calédoniens devient invariable ; ce sont de belles forêts de cocotiers, d’abondantes et productives plantations indigènes, des groupes
Le kagou (rhynochetos jubatus). — Dessin de Mesnel d’après nature.
de verdure au milieu desquels disparaissent les étroites habitations des naturels. L’on a peine à croire en contemplant ces charmantes oasis auxquelles la nature a prodigué ses plus merveilleuses richesses, que l’homme qui a été appelé à en faire son domaine, n’y trouve d’autre jouissance que la guerre, la guerre acharnée et constante contre ses voisins et ne rêve d’autres triomphes que des festins de cannibales.

Le versant du Mont-d’Or forme sur la côte Ouest de la colonie, une limite remarquable. C’est là que l’on passe des plaines et des vallées cultivables, fertiles et peuplées du Nord, à la stérilité et à la solitude générales des montagnes abruptes qui, comme nous l’avons vu, constituent le Sud de la Nouvelle-Calédonie. Les montagnes d’origine éruptive, stériles et rocailleuses, viennent s’y terminer à pic au bord de la mer sans permettre, comme ailleurs, à une bande de sol horizontal et fertile de s’étendre sur la plage.

La bise était très-favorable et nous longions de très-près la côte. Quatre baies, correspondant à autant de cours d’eau, se succèdent entre le Mont-d’Or et le canal Woodin ; elles peuvent offrir un refuge aux navires, surtout la baie Ngo. La baie des Pirogues, qui précède cette dernière, a été ainsi nommée parce que les kanaks du Sud viennent le long de la rivière qui s’y jette chercher les kaoris avec lesquels ils construisent leurs pirogues. Ils font flotter ces arbres sur la rivière jusqu’à la mer. On re connaît pas exactement ce cours