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Une rue de Nouméa ou Port-de-France. — Dessin de Moynet d’après une photographie.


VOYAGE À LA NOUVELLE-CALÉDONIE,


PAR M. JULES GARNIER, INGÉNIEUR CIVIL DES MINES.


1863-1886. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


I


Coup d’œil géographique et rétrospectif sur l’Île de la Nouvelle-Calédonie. — Pourquoi ce nom ? — Les récifs côtiers. — Nouméa la capitale.

La Nouvelle-Calédonie gît dans l’hémisphère sud, entre les 20° 10’ et 22° 26’ de latitude sud et les 161° 35’ et 164° 35’ de longitude à l’est du méridien de Paris, à deux cents lieues environ à l’orient de la Nouvelle-Hollande, et à près de deux cent cinquante lieues au nord de la Nouvelle-Zélande, ces grandes terres, asiles de la solitude et de la barbarie il y a moins de cent ans, et que l’Angleterre transforme chaque jour à l’image de l’Europe.

À l’est et au nord de la Nouvelle-Calédonie sont les Nouvelles-Hébrides, les Vitis, les Salomon, etc. ; archipels importants encore peu explorés, mais tous plus chauds ou moins salubres que la Nouvelle-Calédonie. Notre colonie océanienne semblerait ainsi être le complément des deux possessions anglaises. La Nouvelle-Zélande, à cause de son climat, ne saurait produire les denrées coloniales ; quant à la Nouvelle-Hollande, tous les points de sa surface où ces denrées pourraient être cultivées, sont affligés d’un climat meurtrier, comme tous les rivages intertropicaux des grandes terres. Aussi, quelques tentatives de colonisation faites dans les parties chaudes de la Nouvelle-Hollande ont-elles eu parfois de déplorables résultats. Par sa position la Nouvelle-Calédonie acquiert donc une grande importance ; elle semble avoir été placée à dessein à égale distance des deux grandes terres océaniennes ; plus tempérée que l’une et l’autre dans le chaud et dans le froid.

La Nouvelle-Calédonie se dirige du nord-ouest au sud-est ; elle élève au-dessus des eaux une longue bande de soixante-quinze lieues de longueur, large de treize ; cette faible largeur permet aux brises de la mer de circuler partout, rafraîchissant et purifiant l’atmosphère ; ici règnent les vents alizés, c’est-à-dire, dans cet hémisphère, les vents de sud-est.

La constitution physique de cette île et la fertilité de son sol répondent assez bien à l’intérêt et à l’attention que soulève déjà sa situation géographique ; on voit, par la carte, qu’elle est, comme la plupart des terres de l’Océanie, ceinte de bancs de coraux, qui laissent ordinairement, entre eux et la terre, un canal suffisamment dégagé pour que la navigation y soit possible ; et, bien loin de lui nuire, comme on serait d’abord tenté de le supposer, ces lignes de corail forment une véritable jetée contre les grandes lames et les gros temps du large :


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  1. Voyez tome III, page 130.