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ans, à l’époque où le château de Fontainebleau allait être décoré par des artistes italiens. Enfin François Ier s’était encore adressé à un autre grand peintre, Andrea del Sario qui, aveuglé par un indigne amour, oublia les lois de la probité et abusa de sa confiance.

Les Italiens qui fondent en France ce qu’on a appelé l’École de Fontainebleau sont des peintres et des décorateurs : Rosso, Primatice, Niccolò dell’ Abbate. Rosso de Rossi, ou maître Roux, comme on l’appelait, né à Florence en 1496, et qui s’empoisonna, en 1541, ne pouvant survivre à la honte d’avoir accusé injustement de vol et fait mettre à la torture le sculpteur da Pellegrino, son ami, dont l’innocence fut reconnue, était « un génie de décadence ; un talent vigoureux et tourmenté, une espèce de Michel-Ange avorté. » Il donne à ses figures, qu’elles soient des femmes, ou même des enfants, une musculature exagérée. Il couvrit de ses compositions, exécutées à fresque par ses aides, la galerie de François Ier (voy. la gravure p. 13), longue de soixante-cinq mètres.

Tout un système de figures en relief, de cariatides, de nymphes, de satyres, d’enfants, de fruits, de fleurs et d’emblèmes divers en stuc, s’enroulant autour de médaillons, sert d’encadrement aux peintures à fresque. Cette décoration capricieuse, abondante, d’un dessin incorrect, mais pleine de verve et de libre fantaisie, contribue à faire de cette galerie une des principales curiosités artistiques du palais. Rosso était le conducteur de tous ces travaux, à cinquante livres de gages par mois ; il ne put les terminer. Les sujets des peintures se composent d’allégories où de scènes tirées de la fable. Ces peintures qui avaient presque entièrement péri ont été restaurées ou refaites par M. Couder, sous Louis-Philippe.


Vue du parterre, du parc et du canal. — Dessin de E. Therond d’après nature.

Une rivalité ardente s’éleva entre Rosso et Primatice, qui devait lui succéder. Francesco Primaticcio, peintre, sculpteur, architecte, né à Bologne en 1504, mort à Paris en 1570, après avoir étudié le dessin sous Innocenzio da Imola et le coloris près du Bagnacavallo, avait passé six ans auprès d’un plus robuste élève de Raphaël, le plus robuste de tous, Jules Romain, qui l’employa avec succès dans ses travaux du palais du T, à Mantoue, comme peintre et comme étant habile à composer des ornements en stuc. Ce double talent de peintre, de sculpteur et d’ornemaniste, fut son titre de recommandation auprès de François Ier, auquel le duc de Mantoue l’adressa en 1531. Le talent de Primatice, contrastant avec celui de Rosso, ne rappelle point la manière forte et savante de Jules Romain ; il se rapproche plutôt du style léger et de la grâce du Parmesan ; sa composition est abondante et facile ; son coloris est doux ; les poses de ses figures sont maniérées, les formes féminines élégantes, minces ; la stature allongée. On a fait la re-