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tours dont, pendant une autre série de siècles, Français et Anglais, soldats du roi et routiers, calvinistes et ligueurs se sont disputé la possession avec rage, et toujours, aux dépens du repos, du pain, de l’honneur et de la vie des paisibles pâtres et laboureurs indigènes.

Ce que ces conflits et les oppressions qui en découlaient entassèrent de griefs et de ressentiments dans ces couches inférieures de l’ordre social, l’histoire de la Révolution pourrait le dire ; car quelques-uns des plus aveugles, des plus implacables exécuteurs de ses vengeances sortirent de cet Eden de la Cère. Pour ne citer qu’un nom, Carrier — Carrier de Nantes — naquit dans cette bourgade d’Yolet dont je viens de contempler à l’instant les sites élyséens.


Entrée du bois Mary vis-à-vis le Falgoux. — Dessin de Jules Laurens.

…Hélas ! quatre cents ans auparavant, dans ce même berceau de fleurs, d’ombre et de verdure, un homme était né, admirablement doué de cœur, d’intelligence et poussant jusqu’aux dernières limites le sentiment de la nature et l’intuition de l’avenir. Ballotté toute sa vie entre ces deux facultés, devançant de bien haut son siècle, par la poésie de l’une et les aspirations de l’autre, il n’aurait pourtant laissé qu’une mémoire légendaire parmi ses compatriotes, — la trace d’une voix criant dans le désert, — si les événements dont nos pères ont été acteurs ou témoins, n’étaient venus donner à quelques-uns de ses écrits une prophétique consécration. J’ai déjà nommé Jean de la Roquetaillade, à propos du passé d’Aurillac ; nous ne pouvons nous éloigner