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comme leur métropole et communiquent par cette ville avec le monde extérieur. Les denrées des campagnes environnantes, vins, oranges, froment, coton, sumac, sont toutes d’une excellente qualité, et bientôt le drainage et la mise en culture de la grande plaine, aujourd’hui marécageuse, qui s’étend au sud de Catane, à l’embouchure du Simeto et de la Gurna Lunga, accroîtra d’une manière considérable la quantité de ces divers produits d’exportation.

Ce n’est pas tout. Dans un avenir prochain, Catane deviendra le centre du réseau des chemins de fer siciliens : c’est là que s’opérera la jonction des voies ferrées de Messine, de Palerme, de Syracuse, et, par conséquent, c’est là que sera, pour toute la Sicile, le centre du mouvement des voyageurs et du trafic des marchandises. Actuellement, Catane est déjà la ville où les routes carrossables se réunissent en plus grand nombre, et parmi ces routes, l’une est la plus importante de l’île entière, puisqu’elle la traverse de part en part, de la mer d’Ionie au golfe de Palerme. Il est vrai que ce chemin national est aujourd’hui presque entièrement délaissé à cause des plus grandes facilités qu’offre la voie de mer. Dans l’année, à peine trois ou quatre cents personnes se rendent-elles directement par terre de Catane à Palerme ; mais, lorsque le trajet entier pourra se faire en quelques heures, le courant du trafic changera soudain et la plupart des voyageurs préféreront certainement ne pas s’exposer aux chances du mal de mer.

Les diverses routes carrossables qui rayonnent autour de Catane vers les petites villes des environs, Lentini, Caltagirone, Paternò, Adernò, et vers toutes les bourgades de la région etnéenne, ont donné une activité relativement assez grande à la construction des véhicules de toute espèce. C’est donc à Catane que l’on peut le plus facilement établir, au point de vue artistique, une comparaison entre ces voitures, car dans ce


Syracuse. — Dessin de E. Thérond d’après une photographie de MM. Sommer et Behles.


pays les tombereaux et les charrettes ne sont pas, comme en France, de simples assemblages de planches, ce sont aussi, dans une certaine mesure, des œuvres d’art. La caisse du véhicule repose sur un essieu en fer ouvragé qui se recourbe et s’enroule en gracieuses arabesques. Chacune des parois extérieures de la charrette est divisée en deux compartiments formant tableaux. Le jaune d’or, le rouge cru et autres couleurs vives dominent dans ces peintures qui parfois ne manquent pas de style. Ce sont pour la plupart des scènes religieuses, tantôt l’histoire de Jésus-Christ ou de sa mère, tantôt celle des patrons les plus honorés des Siciliens, tels que Jean-Baptiste, sainte Rosalie, sainte Agathe ou Geneviève de Brabant. Quelquefois l’histoire profane ou même des scènes d’amour se hasardent aussi sur les panneaux des charrettes ; peu à peu les peintures traditionnelles font place à d’autres tableaux qui laissent plus de liberté au génie spontané de l’artiste. L’esprit moderne fait son apparition dans ce recoin méprisé du grand domaine des arts ; mais bientôt, les wagons de chemins de fer, les voitures à la mode de Paris et les chariots de ferme construits sur le type anglais auront remplacé les chars siciliens aux peintures éclatantes.

Je ne pouvais quitter la région de Catane sans aller visiter les mines de soufre de Centorbi, les plus rapprochées de la base de l’Etna. La première partie du trajet s’accomplit dans une de ces carioles disloquées où de nombreux voyageurs entassés pêle-mêle tâchent de s’entrevoir à travers un nuage de poussière. La vue du paysage est fort belle en certains endroits, notamment sur les hauteurs de Misterbianco, mais je n’en fus pas moins très-heureux lorsque j’arrivai au terme de ma première étape, dans cette ville d’Adernò où j’avais fait connaissance avec les gendarmes siciliens.

Adernò est située, à l’angle sud-est de l’Etna, sur une haute terrasse de laves qui se termine, du côté de la