des pans de roches qui deviennent des îlots et des
écueils, comme les Faraglioni ; dans ses accès de colère,
il écrase et dévore par milliers les hôtes étrangers qui
sont venus lui demander l’hospitalité et qui se nourrissent
de la chair de ses troupeaux. Il est formidable à
voir, et néanmoins le sage Ulysse va le braver jusque
dans son autre ; pendant le sommeil du cyclope, le héros,
type de l'impassible laboureur, ne craint pas de lui
ravir ses richesses, puis, quand le monstre s’éveille, la
proie qu’il cherche sait échapper à sa fureur aveugle.
LE MONT-ETNA
Au lieu de faire un grand détour par Catane, il m’était facile d’aborder directement l’Etna en partant d’Aci-Reale. La route, qui de cette dernière ville monte vers Nicolosi, est plus riche en beaux points de vue que le chemin d’ascension suivi par tous les voyageurs étrangers. À l’ouest d’Aci-Reale, quand on s’élève de contre-fort en contre-fort comme par une succession de degrés, on ne cesse d’avoir sous les yeux l’immense jardin qui ceint la base de la montagne et l’étendue bleue de la mer Ionienne, que le feuillage touffu des arbres de la plaine semble découper en golfes aux contours indécis. Des villages, beaucoup plus riches que ne le sont la plupart des villes dans les autres districts de la Sicile, se montrent sur la cime de chaque hauteur, dans le creux de chaque vallon ; des maisons de plaisance, des églises à coupoles apparaissent au milieu de la verdure ; de toutes parts, on voit les signes de la grande richesse territoriale du pays.
Laissant à l’auberge d’Aci-Reale tout mon bagage inutile, je bouclai le havresac sur mon dos et, joyeux comme un étudiant d’Allemagne, je commençai mon voyage pédestre sans m’infliger l’ennui d’un guide, triste compagnon qui partage rarement les impressions de celui qu’il conduit. Il est vrai qu’en voyageant ainsi