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les arabesques, les inscriptions, les sculptures des colonnes. Le tableau est des plus saisissants au point de vue de la couleur, lorsque le prêtre, couvert de ses vêtements d’or et de soie, officie en pleine lumière sur les hautes marches de l’autel, et que, par le contraste, la congrégation est seulement à demi entrevue dans l’ombre de la nef.

La cathédrale de Monreale, qui couronne un contrefort du Monte-Caputo, à quatre kilomètres au sud-ouest de Palerme, est un monument de l’époque normande à peine inférieur en beauté à la chapelle Palatine et de proportions beaucoup plus considérables. La route qui monte vers Monreale traverse un long faubourg où, malgré la poussière et les ordures, l’odeur dominante est celle des multitudes d’orangers de la plaine. Au pied de la colline, on laisse à droite ce fameux couvent des Capucins, où tous les moines trépassés sont séchés au four, puis rangés comme des figures de cire dans les niches de galeries souterraines. De nombreuses gravures ont fait connaître l’aspect de ces horribles collections de cadavres que leurs frères encore en vie parfument d’eau de senteur et décorent de bouquets et de rubans pendant les jours de fête. Les femmes n’ont point le droit d’entrer dans ces nécropoles, comme si les moines, même après la mort, étaient exposés à rompre leurs vœux.

Par leur masse énorme, la cathédrale de Monreale et


cloître des Bénédictins à Monreale. — Dessin de H. Clerget d’après une photographie de MM. Sommer et Babies.


le monastère adjacent semblent former la moitié de la ville, amas sordide de maisons où l’on ne trouve pas même d’auberge, pas même de café, et qui compte pourtant une population de près de vingt mille âmes. L’extérieur de l’église n’offre rien de remarquable comme architecture, si ce n’est les absides aux arcades entrecroisées, aux assises de marbre alternativement blanc et noir. Les deux portes de bronze sont des œuvres fort belles. Celle du nord, qui date de la fin du douzième siècle, est entourée de mosaïques et divisée en vingt-huit compartiments, dont chacun représente une scène de la vie de Jésus-Christ ou renferme la figure d’un prophète ou d’un apôtre ; de gracieuses arabesques d’une belle exécution séparent chaque sujet. La porte occidentale, encadrée dans un porche où les ornements mauresques se mêlent au roman et au byzantin, est l’œuvre du célèbre grec Bonanno de Pise, l’un des architectes de la tour penchée. Il paraît que les bas-reliefs de la porte de bronze de Monreale, représentant les scènes principales de l’histoire biblique, sont tout simplement une reproduction de ceux de la cathédrale de Pise, qui furent détruits par un incendie en 1596. Les figures, assez grossièrement exécutées, sont vigoureusement conçues, et l’ensemble de toutes les scènes produit un grand effet. Il est fâcheux pour la gloire de Bonanno, que, de ses deux portes, ce soit précisément celle de Pise, l’une des