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denrées alimentaires, consommées dans le pays ; il ne reste donc que 2 391 hectares en cannes à sucre, café, cacao, coton, girofle et rocou, c’est-à-dire, en produits d’exportation.

Et encore sur les 1 031 hectares de rocou, beaucoup restent inutiles, attendu le grand abaissement de la valeur de cette teinture végétale, qui fait que la récolte est parfois négligée.

Aujourd’hui la Guyane, et principalement Cayenne, vivent sur la transportation. C’est le nombreux personnel libre qu’elle entraîne après elle, c’est l’argent que ce personnel dépense dans la ville, ce sont les fournitures considérables, nécessaires au service pénitentiaire et à la marine coloniale, qui font aller le commerce et donnent au pays un peu de bien-être et de mouvement.

Que l’on enlève la transportation de la Guyane pour la placer ailleurs, ce sera l’arrêt de mort de la colonie. Au bout de quelques années, la forêt reprendrait possession d’un domaine qu’une occupation de trois siècles a entamé à peine.

Voilà donc où en est arrivée une colonie qui, à un certain moment de son existence, semblait destinée à un si brillant avenir. Cette ère florissante fut inaugurée par les travaux de l’ingénieur hollandais Guizan, qui, avec l’approbation de son gouvernement, s’engagea au service de la France. Toutes les améliorations du pays datent de l’influence et de la direction de cet homme éminent par son mérite et ses vertus privées. Son nom est encore vénéré et entouré du respect de tous. Canaux, défrichements, assainissements, dessèchements de marais, c’est-à-dire la santé, la prospérité, la vie de la colonie, sont dues à ce génie modeste, dont le nom ne dépassa cependant pas l’enceinte où rayonnèrent son talent et ses travaux. Généreux envers sa mémoire, le gouvernement a donné le nom de Guizan à un bourg de l’Approuague.

C’est pendant cette période que le café fut planté à la Guyane. C’est un lieutenant de vaisseau qui fit ce cadeau à la colonie française, en 1772. Le café était déjà cultivé avec succès à la Guyane hollandaise ; mais désirant conserver ce monopole, les Hollandais avaient décrété la peine de mort contre ceux qui délivreraient des graines de café avant de les avoir passées au feu, afin d’en détruire le germe reproducteur.

Ce lieutenant de vaisseau, nommé M. de la Motte-Aigron, se rendit à Surinam, et là, s’aboucha avec un Français nommé Mourgues, et lui promit une belle récompense, ainsi que le pardon de certains délits qui l’avait fait bannir de Cayenne, à condition de l’aider dans son projet.

À force de ruse et d’adresse, les deux complices parvinrent à se procurer une livre de café en cosse, propre à semer, et furent assez habiles pour partir de Surinam en dérobant leur larcin aux investigations de la police, qui visitait scrupuleusement les bagages et les voyageurs.

On sait que le café, originaire d’Arabie, avait été transporté à Constantinople en 1554, et qu’on en faisait déjà usage à Paris en 1643. Ce fut en 1798 que sir Nicolas Laws en planta la première graine à la Jamaïque.

Le café réussit parfaitement à la Guyane française, et celui de la Montagne-d’Argent a eu de tout temps une juste réputation.

En 1781, une corvette, arrivant de l’Île-de-France, apporta quatre plans de giroflier que l’intendant, M. Poivre, expédiait à Cayenne, sous la direction de M. d’Allemand, commissaire, qui les avait enlevés aux Moluques. Ces quatre plans furent concédés à divers propriétaires. Plus tard, le gouvernement s’adjugea le monopole de la culture des épices ; mais ce privilége dura peu, et l’exploitation du girofle et des autres épices devint une des branches les plus lucratives de l’exportation coloniale.

Le cotonnier est un arbre indigène : les Indiens l’ont de tout temps utilisé. Les plaines voisines de la mer, et imprégnées de senteurs salines, sont des plus favorables à cette culture, et le coton de la Guyane a été renommé sur les marchés européens.

La canne à sucre poussait volontiers dans ces plaines marécageuses, et les nombreux cours d’eau, soumis aux marées de l’océan, faisaient facilement mouvoir les grandes roues des anciennes machines qui, à une époque où la vapeur était inconnue, étaient l’unique mise en train des cylindres broyant les cannes. De là s’écoulait ce jus précieux qui, sous la forme de sucre, de tafia et de rhum, entrait de plein pied dans les nécessités de l’alimentation publique.

Ces richesses principales exploitées alors, manquent-elles aujourd’hui ? non. L’industrie moderne et la marche progressive de la science ont trouvé d’autres filons encore dans cette inépuisable mine.

La noix de coco donne de l’huile en abondance, les matières textiles sont communes dans la forêt, plusieurs fruits produisent de la cire ; avec les larges feuilles du mocoumoucou on peut faire du papier à bon marché, la riche flore guyanaise offre à la médecine et à la chimie des produits variés, et la diversité des bois de teinture, d’ébénisterie et de construction est infinie.

Que faut-il ? Des bras, des travailleurs, des capitaux !

À Cayenne, il n’y a pas de bourgeoisie et de peuple ; il y a des blancs et des noirs. La fusion ne s’est pas complétement faite entre les races. Le préjugé de couleur existe, moins fort peut-être qu’aux Antilles, mais il existe néanmoins. On tient à l’aristocratie de la peau, et c’est une noblesse qui peut se prouver plus facilement que toute autre, car les greffes étrangères altèrent singulièrement les rejetons de l’arbre généalogique. Mais sur ce fossé profond, que le préjugé semble avoir placé entre les deux races, il a été jeté bien des passerelles, et bien des endroits se franchissent à gué. Somme toute, blancs, gens de couleur et nègres vivent en bonne intelligence.

Tout cela se touche par la base ; les blancs ont leurs nourrices, leurs sœurs et frères de lait, leurs parents de