Page:Le Tour du monde - 13.djvu/237

Cette page n’a pas encore été corrigée


alors que la ville de Nichapour était florissante, douze mille sources et canaux arrosaient son territoire.

Voici une anecdote qui a pour objet de prouver qu’à cette époque les arts et les lettres y étaient fort en honneur.

Dans la ville seule, on comptait douze mille mosquées et écoles. Un jour l’imam Reza, passant dans un faubourg de la ville et voulant écrire quelques mots, demanda si quelqu’un pouvait lui prêter un encrier ; ce fut à qui aurait l’honneur de lui offrir le sien. Les hommes placés aux derniers rangs jetèrent les leurs par-dessus les premiers, et en un instant on vit s’élever un monceau de cinq ou six mille encriers. Je donne le minimum : plusieurs personnes, très-fières de bien connaître l’histoire de leur pays, m’ont affirmé que le nombre de ces encriers jetés aux pieds de l’imam Reza avait été de douze mille ; c’est, du reste, le chiffre adopté dans toutes les traditions de Nichapour.

Une autre anecdote assez étrange se rapporte à Caï-Caous, deuxième roi de la dynastie des Caïanicus.

Ce roi, ayant fait de Nichapour sa capitale, après l’avoir dotée de toutes sortes de monuments et d’embellissements, voulut être adoré de ses sujets à l’égal de Dieu. Pour donner un signe de sa divinité, il se fit construire un trône aérien. C’était un siége fort léger auquel on attelait un grand nombre d’aigles.


Mosquée sur les ruines de Tous (environs de Méched). — Dessin de A. de Bar d’après un croquis de M. de Blocqueville.


Assis sur ce trône, Caï-Caous tenait une lance du bout de laquelle pendait un morceau de viande ; les aigles affamés volaient sans cesse vers cet appât pour le saisir, de sorte que dans leurs efforts ils emportaient dans l’air le trône sur lequel était assis le roi. Il suffisait ensuite à Caï-Caous d’abaisser sa lance pour redescendre au milieu de ses sujets prosternés.

On dit encore que dans les environs de Nichapour, ce roi possédait un lieu de plaisance si beau et si agréable qu’on le comparait au paradis. Dieu en ayant conçu de la jalousie envoya l’ange Gabriel pour en interdire l’entrée. C’est pourquoi l’ange parut un jour devant Caï-Caous et lui montra une porte massive couverte de pierres précieuses, de perles et d’or. Le roi voulut avoir cette porte à tout prix ; mais l’ange lui répondit qu’il ne lui en ferait présent qu’à la condition de partager avec lui la jouissance du jardin. Caï-Caous permit alors à Gabriel d’aller poser sa porte à l’entrée de ce lieu de délices. Or, il arriva que depuis ce jour, le roi ni aucune autre personne ne put en franchir le seuil.

Les montagnes, qui continuent la chaîne de l’Elbourz, contiennent des mines de fer, de cuivre, de sel, un peu de rubis, de l’étain, et surtout la fameuse mine de firouzeh (turquoises). Presque toutes ces mines sont inexploitées ; ceux qui voudraient entreprendre de les mettre en valeur ne pourraient compter sur aucune sécurité.