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Maison turque, à Bucharest. — Dessin de Lancelot.


DE PARIS À BUCHAREST,

CAUSERIES GÉOGRAPHIQUES[1],


PAR M. LANCELOT.


1860 — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.




XLVII

DE GIURGEVO À BUCHAREST.


La hora (suite). — Souvenirs de Rubens et de Michel Ange. — Chevaux et cocher. — Comme quoi il ne suffit pas de parler sept langues pour avoir de l’eau à boire. — Bucharest.

Une douzaine de garçons se prennent par la main et forment une ronde qui se traîne aussi languissamment que la musique ; d’une marche un peu balancée, ils font quatre ou cinq pas à gauche, en figurent deux un peu plus vifs sur place, s’arrêtent un instant, puis recommencent.

Peu à peu la mandoline égaie la lente mesure, et semble, en jetant quelques notes sonores, presser la marche, mais rien n’émeut la cornemuse ; elle s’obstine dans son rhythme indolent. Enfin arrive une phrase d’appel trois fois répétée que les danseurs accompagnent chaque fois de trois frappements de pied sur le sol en regardant les filles groupées derrière eux. Elles hésitent : on dirait qu’elles se consultent du regard ; puis elles se prennent aussi par la main et forment un cercle autour du premier. À un autre appel plus impérieux, elles le rompent et se mêlent à la ronde des garçons.

À ce moment, le vieux tzigane ouvre ses petits yeux vifs en même temps qu’il montre dans un sourire de macaque ses dents blanches et aiguës, et secouant avec enthousiasme au-dessus de la gracieuse théorie une pluie de cadences joyeuses et pressées, il exprime très-bien par son harmonie tourmentée le doux frémissement qui doit courir dans toutes ces mains unies.

Dès lors la hora est formée ; elle dure longtemps,

  1. Suite. — Voy. t. III, p. 337, 353, 369 ; t. V, p. 193, 209 ; t. VI, p. 177, 193 ; t. VII, p. 145, 161, 117 ; t. XI, p. 33, 49, 65, 81 ; t. XIII, p. 177.