merciaux, appartenant à des Arabes et à des Portugais
de la côte, sont expédiées dans l’intérieur avec de
grandes quantités de mousquets, de munitions, de grains,
de verre et de cotonnade. Ces derniers articles servent,
au début du voyage, à payer les frais de route et à faire
des achats d’ivoire ; mais il n’est pas une de ces caravanes
qui n’ait accompagné les indigènes dans leurs razzias
et n’ait attaqué une peuplade quelconque avec l’intention
d’y faire des captifs. Nous n’avons pas un seul
exemple du contraire. Le fait est si commun, qu’il en
résulte une dépopulation effrayante. L’arc et les flèches
ne tiennent pas contre le mousquet ; la fuite des habitants,
la famine et la mort s’ensuivent. Et nous répétons
ce que nous avons dit plus haut avec une ferme
conviction, qu’il n’est pas un cinquième des victimes de
ces chasses, souvent même un dixième, qui arrive à
Cuba ou partout ailleurs, et profite à ces bons maîtres
que leur destine la Providence, car c’est ainsi que les
possesseurs d’esclaves interprètent les Écritures.
Ce dernier système des bandes guerrières trafiquantes est celui des Portugais de Têté, et le carnage dont il nous a donné le spectacle défie toute description.
Buffles dans un jardin (voy. p. 172). — Dessin de E. Forest.
Comme tous les médecins, nous avions assisté à des
scènes bien douloureuses ; le tableau de la mort nous
était familier ; mais les horreurs produites par le commerce
de l’homme dépassent tout ce que nous aurions
pu croire.
Le système des engagés volontaires ou des libres émigrants pour l’île de la Réunion ou pour tout autre pays, n’est qu’un leurre.
Nous avons vu les libres émigrants du pays des Manganjas descendre le Zambèse dans des canaux qu’ils emplissaient, et où ils étaient chargés de chaînes. « Vous n’y pouvez plus rien, nous disait en riant le gouverneur de Têté, nous sommes couverts par le pavillon français. » Il y a en France, croyons-nous, des milliers d’hommes qui auraient payé d’un coup de pied ce compliment au drapeau tricolore.
En résumé, d’après les faits observés, nous affirmons hautement que la traite, quelque nom qu’elle revête, ne se recrute qu’au moyen d’une véritable chasse, et oppose une barrière insurmontable à toute espèce de progrès.