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arêtes osseuses, comme pour jeter parmi les fleurs des images de mort et de ruine ; étendez vos regards vers cet horizon, dont les superbes créneaux terminent à peu de distance la vallée, ou suivez à l’opposé les plis onduleux du sol incliné, allant se perdre comme des vagues houleuses dans les sinuosités d’un détroit profond, et vous aurez évoqué une faible image du cirque de Mandailles. »

Mes lecteurs me sauront gré, sans aucun doute, d’avoir remplacé ici mes rapides impressions personnelles par le témoignage profond, pénétré, pour ainsi dire filial, d’un écrivain de la Haute-Auvergne, auquel les publications de l’association Cantalienne doivent un grand nombre de leurs meilleures pages[1].

J’avoue, du reste, que j’étais attiré dans ces hauts lieux moins par le charme du paysage que par le désir d’y voir de mes yeux et d’y toucher de mes mains les pièces du procès pendant devant les géologues modernes, procès souvent plaidé et non encore jugé.


Le château d’Anterroche. — Dessin de Lancelot d’après l’album de M. Henri de Lanoye.

« Si le cirque gigantesque d’arêtes qui enclot les sources de la Jordanne et que dominent les pics de Chavaroche, les puys Mary, de Pérurches, de Bataillouze, etc., n’est pas l’enceinte d’un cratère, » a dit l’Allemand Steininger, « il n’existe aucun cratère nulle part. »

Cette opinion d’un géologue n’a guère trouvé d’opposition parmi ses confrères ; l’existence d’un cratère central étant généralement admise comme une condition obligée d’un volcan ; mais ce cratère est-il d’éruption ou de soulèvement ? That is the question !

Cette question pouvant paraître complexe ou obscure à quelques-uns de mes lecteurs, je vais, après avoir résumé succinctement quelques-unes de mes remarques antérieures, faire appel à des voix plus magistrales que la mienne pour l’exposer clairement.

Les couches de sédiments sur lesquelles reposent toute la masse volcanique du Cantal peuvent être divisées en deux classes. Les plus basses sont composées de gravier, de sables et d’argile, matériaux provenant de la décomposition des schistes granitiques formant les bords et le fond du bassin lacustre, auquel il faut toujours revenir quand on veut remonter aux origines du volcan Cantalien ou étudier sa base. Les secondes couches consistent en marnes siliceuses ou calcaires, telles que les eaux de sources fortement chargées de carbonates, de sulfates de chaux et de silicates peuvent encore en déposer. À une heure donnée des temps géologiques, ces

  1. M. Henri de Lalaubie, — Dictionnaire statistique, ou histoire, description et statistique du département du Cantal, Aurillac, 5 vol. in-8. — Cet ouvrage, commencé par M. Deribier du Châtelet, puis, après la mort de ce savant, refondu et augmenté par les soins de l’association cantalienne, forme une véritable encyclopédie locale, la plus complète peut-être que possède un département français.