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ferrée, Fowey, port aujourd’hui déchu, mais qui s’est distingué autrefois dans les attaques des Anglais contre la France, et Falmouth, célèbre par ses quakers et son poisson salé, s’il faut en croire lord Byron. Enfin l’agriculture occupe aussi les bras dans le Cornouailles, et l’on a pu dire avec raison que dans ce riche comté il y a trois récoltes : celle qui mûrit à la surface du sol, la moisson ; celle qui provient du sein des eaux, la pêche, et surtout la pêche du hareng ou pilchard ; enfin celle qu’on retire des entrailles du sol par le travail des mines, et ce n’est pas la moins fructueuse des trois.

Cette pointe du Cornouailles, pays de roches granitiques, porphyriques et serpentineuses, de schistes talqueux et micacés passant quelquefois à l’ardoise et traversée par de nombreux filons métalliques, a été fouillée du mineur dès la plus haute antiquité. Les Bretons, qui paraissent autochtones sur cette partie de la Grande-Bretagne, et qui semblent avoir détaché un de leurs rameaux sur l’Armorique, notre Bretagne actuelle, tandis que d’autres prétendent que c’est de l’Armorique qu’est parti l’essaim qui a civilisé la Grande-Bretagne, les Bretons du Cornouailles ont de toute antiquité exploité les mines de cuivre et d’étain de cette inépuisable région. Au temps d’Homère, les Phéniciens venaient charger ces métaux jusqu’en ces lieux éloignés, où ils faisaient escale, tandis qu’ils allaient chercher l’ambre sur les rivages de la Baltique. Les fameuses Cassitérides, ou îles d’étain, sont, dit-on, les îles Schilly, celles que nous appelons en français, on ne sait trop pourquoi, les Sorlingues, et qui sont situées en face du cap Cornouailles ; mais d’autres prétendent que ces Cassitérides des anciens gisaient dans l’Atlantique, vis-à-vis les côtes d’Espagne, au nord, près des rivages ou s’étend aujourd’hui la Galice. On dispute encore et la question est loin d’être vidée, adhuc sub judice lis est ; aussi n’ai-je pas la prétention de la trancher.

Vue de Truro. — Dessin de Durand-Brager.

Mais si l’on est en doute sur la véritable position des Cassitérides, on ne l’est pas sur l’ancienneté des exploitations bretonnes. Les vieux travaux existent toujours, et ils datent de l’époque celtique. Nous savons d’ailleurs par l’histoire que les Carthaginois, les Grecs, les Phocéens de Massilie suivirent les traces des Phéniciens, et se présentaient avec leurs barques dans les ports du Cornouailles pour s’y livrer au commerce des métaux. Serait-ce en souvenir de ces anciennes relations avec les Phéniciens et les Carthaginois que les habitants du Cornouailles reçoivent encore au baptême des noms comme ceux d’Annibal et de Zénobie fort peu employés ailleurs ?

Après les Bretons, les Romains, si habiles à profiter de leurs conquêtes et les plus grands administrateurs