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rent cet établissement comme la limite méridionale extrême où les Pakehas ont le droit de s’avancer : « Jusqu’ici et pas plus loin, » disent-ils. Ils mettent une obstination invincible à empêcher le prolongement de la Great south road, et pendant l’insurrection de Taranaki en 1861, William Thomson, le chef des tribus Waikato déclara que, si le gouvernement faisait avancer ses troupes au delà de Mangatawhiri, ou s’il continuait la construction de la route sous la protection de la force armée, ce serait là un cas de guerre qui entraînerait l’ouverture des hostilités. L’importance attachée à la possession de cette place s’explique par le développement qu’elle pourra acquérir quand le Waikato sera ouvert au commerce européen.

Le 9 mars, au point du jour, le ruisseau de Mangatawhiri nous offrit un bain rafraîchissant, mais nous ne nous mîmes en route qu’à neuf heures. Le canot avait été creusé récemment dans le tronc d’un sapin kahikatea ; long de soixante pieds anglais, large de quatre, profond de trois, il était assez grand pour recevoir toute notre troupe (vingt-quatre personnes) avec nos nombreux bagages. Quand on l’eut nettoyé et qu’on eut étendu dans le fond une couche de fougère fraîche, les Maoris s’assirent à l’avant, chacun pourvu de sa rame, et dans le milieu les cinq Pakehas ou Européens. Quatre femmes indigènes, avec deux enfants, se pressaient derrière nous ; elles allaient au-devant de leurs maris quelles espéraient rencontrer sur le Waikato.

Confluent du Rangirité et du Waikato.

L’impression que produit la vue de ce fleuve majestueux est grandiose ; je ne puis le comparer qu’au Rhin et au Danube ; il est incontestablement le principal fleuve de l’île septentrionale, il l’emporte sur tous les autres autant par la longueur de son cours que par le volume de ses eaux. La pierre ponce que le courant entraîne continuellement et entasse sur les rives et à l’embouchure, annonce qu’il a sa source dans le voisinage de l’important groupe volcanique du centre de l’île. Ses sources se trouvent dans le cœur du pays, ses eaux baignent les champs les plus favorisés et les plus beaux peuplés par les tribus indigènes les plus nombreuses et les plus puissantes, auxquelles il a donné son nom. C’est bien la grande artère de l’île du nord, et il ne manque absolument à ce grand fleuve qu’une embouchure libre et accessible.

Traduit par É. Jonveaux.

(La suite à la prochaine livraison.)