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reprîmes le chemin de Boghor où nous arrivâmes dans un état facile à concevoir, après dix-huit heures de pluie épouvantable et où nous fûmes bien heureux de nous mettre au lit autant pour nous préserver des fièvres que pour nous reposer de nos fatigues.

Quelques jours après, je quittai la maison de M. Grenier et mon joli pavillon de la Villa d’amore ; un triste pressentirent me disait que je ne devais plus revoir l’homme aimable qui m’avait si bien accueilli. Je ne me trompais pas, et, à peine de retour en France, j’appris que M. Grenier, victime de haines particulières, avait succombé, peu de temps après mon départ, à l’un de ces poisons dont je parlais tout à l’heure.

Les rassa-malah, près de Boghor. — Dessin de M. de Molins.

Enfin, le 10 mars 1861, je vis s’enfuir les côtes de Java comme j’avais vu, le 5 janvier 1858, disparaître celles de France : la malle m’emportait sur ses grandes ailes de fer. Agité de mille pensées diverses, je regardai longtemps l’horizon derrière lequel venaient de s’engloutir les côtes de ce beau pays, où il m’avait été donné d’éprouver les sensations les plus douces, dans la contemplation des merveilles de la nature, comme aussi les plus pénibles, devant le spectacle de l’exploitation et de l’asservissement de mes semblables !

de Molins.