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Non loin de Lorca existait, il y a environ une soixantaine d’années, un de ces pantanos, immenses réservoirs d’eau, dans le genre de celui de Tibi, dont nous avons parlé précédemment. Le pantano de Lorca, qu’on appelait el puente, ou el pantano de puentes, était une digue colossale bâtie en pierres de taille à l’entrée d’une vallée, dans le but de servir à retenir les eaux des montagnes voisines qui venaient s’y réunir ; cette immense muraille, qui ferait la vallée d’une côte à l’autre, avait plus de quatorze cents pieds de hauteur, et se composait de sept étages superposés, dont l’épaisseur, à partir du haut, allait en augmentant de douze pieds à chaque étage, en sorte que la base n’avait pas moins de quatre-vingt-quatre pieds en largeur. Ce grand réservoir fut construit par une compagnie particulière, à la tête de laquelle était, dit-on, un certain Lenurda, qui espérait faire une spéculation très-productive en vendant fort cher aux agriculteurs l’eau dont ils avaient si grand besoin pour leur irrigations, et qui devait décupler le produit des champs arrosés, car les eaux amassées pouvaient suffire pour arroser pendant plusieurs années le territoire de Lorca et celui des environs.

Aguadores de Lorca.

La digue commencée en 1775, ne fut entièrement terminée qu’après beaucoup d’années, et ce n’est qu’au mois de février de l’année 1802 que le pantano fut rempli d’eau pour la première fois. Mais son existence ne devait pas être de longue durée, car moins de trois mois après, le 30 avril, la pression de l’eau renversa tout d’un coup l’immense muraille qui la retenait, et le torrent, se précipitant avec un fracas épouvantable, se fraya