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De là l’expression malaise : vent de un, de deux, de cinq hommes. Rappelons encore ici que la coupe de ces barques indigènes dénote une parfaite connaissance de l’art de la navigation, aussi bien que des nécessités spéciales des parages qu’elles sont destinées à parcourir.

La rade de Soërabaija est placée dans le détroit de Madura formé par l’île de ce nom et la côte de Java. L’Ambon, le bateau à vapeur qui m’a amené, est mouillé à portée de canon de la côte de Madura, basse, plate et couverte, comme celle de Java dont je suis plus rapproché, de la végétation qui inonde toutes ces contrées ; les eaux rapides, jaunes et boueuses, sont habitées par des bandes de requins, et, plus près des côtes, par de nombreux caïmans. De la rade on aperçoit à peine la ville, trahie seulement par quelques colonnes de fumée qui montent perpendiculairement vers le ciel.

Cuisiniers ambulants, à Soërabaija. — Dessin de M. de Molins.

Comme à Batavia, on va ici de la mer à la ville par un grand canal, dont les berges cachent leurs empierrements sous des végétations et des plantes à grandes feuilles du plus gracieux effet. Au milieu de la double haie des caboteurs indigènes, circule la nombreuse flottille des canots, des yoles, des praos et des tambaganes.

Voici, sur la gauche, le fort du Diamant, citadelle de belle apparence ; voici les quais bordés de charmantes maisons javanaises ou chinoises cachées à demi par les mâts des navires amarrés dans le canal. Enfin, sur la rive droite, apparaît la ville européenne : ce sont d’abord les entrepôts et les magasins de riz, de café, de tabac et d’épices que le pays fournit en abondance ; puis c’est un vaste quai planté de tamarins séculaires qui abritent sous leurs ombrages les bâtiments de la Résidence, de la Poste et des principales maisons de commerce de la