Page:Le Tour du monde - 09.djvu/404

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Salluste. Je me borne à indiquer les peintures d’animaux, les chasses, les combats de bêtes fauves traités avec une vigueur, une pétulance étonnantes. Il en est un surtout, encore tout frais, encore en place dans une des maisons récemment découvertes ; un sanglier s’y rue sur un ours en présence d’un lion magnifiquement tranquille qui regarde. C’est deviné, comme disent les Napolitains.

Maison de Lucretius. — Dessin d’Hubert Clerget d’après une photographie.

Et j’aborde la figure. Ici, variété infinie ; tous les genres, de la caricatures l’épopée, sont essayés, épuisés. Le chariot chargé d’une outre énorme et remplie de vin que des esclaves sont occupés à mettre en amphores ; l’enfant qui fait danser un singe, le peintre qui copie un hermès de Bacchus, la rêveuse probablement sur le point d’envoyer un message qu’attend une servante ; le marchand d’amours ouvrant sa cage pleine de petits dieux ailés qui, en s’échappant, lutinent de mille façons une femme pensive et triste ; que de sujets différents ! — Mais je n’ai encore rien dit. Les Pompéiens excellaient surtout dans la peinture de fantaisie. Tout le monde connaît ces nuées de petits génies qui s’abattant sur les murs de leurs maisons, tressaient des couronnes ou des guirlandes, pêchaient à la ligne, chassaient des oiseaux, sciaient des planches, rabotaient des tables, couraient dans des chars, ou dansaient sur la corde en portant des thyrses pour balanciers : l’un accroupi, l’autre agenouillé, l’autre faisant jaillir un flot de vin d’une corne dans un vase, un quatrième jouant de la lyre, un cinquième de la double flûte, sans quitter la corde tendue qui fléchit sous leurs pieds adroits. Mais plus belles que ces funambules divins flottaient les danseuses, merveilles de nonchalance et de légèreté, soulevées d’elles-mêmes et soutenues sans effort dans l’air voluptueux qui les berce. Voyez-les toutes au musée de Naples, celle qui heurte des cymbales, celle qui frappe le tambourin, celle qui tient un rameau de cèdre et un sceptre d’or, celle qui tend un plat de figues, celle qui porte une corbeille sur la tête et un thyrse à la main. Une autre, la tête repliée en arrière, les yeux levés au ciel, enfle son voile comme pour s’envoler ; celle-ci enferme des touffes de fleurs dans un pli de sa robe, celle-là qui, d’une main, tient un plat d’or, couvre de l’autre sa tête avec un pallium ondoyant, comme l’oiseau qui met son cou sous son aile ; il en est qui sont presque nues, il en est qui se drapent de tissus transparents et « tramés d’air, » — quelques-unes s’enveloppent d’épais manteaux qui les couvrent toutes, mais qui vont tomber ; deux d’entre elles, se tenant par la main, s’enlèvent ensemble : autant de danseuses, autant de danses différentes, autant d’attitudes, de mouvements, d’ondulations, d’attributs divers.

Continuons : Nous entrons en pleine mythologie.