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aux libéralités du roi Crésus, fut brûlé l’année de la naissance d’Alexandre (356). L’incendiaire Érostrate subit lui-même le supplice du feu ; mais, à ce prix, il put acquérir la célébrité à laquelle il aspirait.

Édifié de nouveau à frais communs par toutes les villes de l’Asie avec un surcroît de magnificence[1], le temple de Diane fut renversé, pense-t-on, sous le règne de Constantin, et ses matériaux employés par Justinien à la construction de Sainte-Sophie. Aucun vestige ne permet de déterminer son emplacement.

Les autres ruines sont d’origine romaine. On voit encore les restes de l’Agora, un gymnase dont les massives arcades présentent un aspect imposant, le stade, et tout auprès le théâtre creusé dans les flancs du mont Prion.

Un grand intérêt s’attache à ce monument ; il date incontestablement du temps où saint Paul vint à Éphèse, et c’est là sans doute que l’apôtre prit le plus souvent la parole, puisqu’on voit le peuple, ameuté par l’orfèvre Démétrius, y accourir comme en un lieu où il devait le rencontrer[2].

Cette ville, le centre religieux le plus important de l’Asie païenne, grâce au culte de Diane la grande déesse, devint le principal foyer d’où le christianisme rayonna dans l’Asie Mineure. Saint Jean, sauf le temps de son exil à Pathmos, y passa la plus grande partie de sa vie, et la sainte Vierge demeura quelques années près de lui.

Ayaslouk : Ruines de la grande mosquée (intérieur). — Dessin de Guiaud d’après une photographie de M. Svoboda.

Je pourrais parler encore du concile d’Éphèse (Nestorius y fut condamné), des luttes du moyen âge, du passage du roi Louis VII. Mais, je l’ai déjà dit, le cadre restreint où je dois me renfermer, ne se prête point à de pareils développements ; en visitant les ruines de l’Asie Mineure, j’ai cité quelques-uns des faits principaux dont elles furent le théâtre, j’en passe un plus grand nombre sous silence ; le lecteur pourra puiser dans ses propres souvenirs et travailler lui-même sur le canevas dont j’ai essayé de réunir les fils ; il pourra méditer longtemps en face de ces dessins qui reproduisent l’aspect d’une terre classique ; mieux que mon récit, ils auront fixé son attention sur des contrées où tant de grandes choses se sont accomplies, et auxquelles la Providence réserve peut-être encore de hautes destinées.

A. de Moustier.



  1. Alexandre le Grand voulait se charger de cette construction à la condition d’être déclaré fondateur du temple ; les Ephésiens refusèrent et lui répondirent : « Il ne convient pas à un dieu de faire construire des temples pour les dieux. »
  2. Actes des Apôtres, XIX.