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je m’empresse de rentrer à l’hôtel pour faire mes préparatifs de visite aux mines du Rammelsberg.

Avant d’entreprendre ce voyage souterrain, je tâchai d’obtenir de mon hôte les renseignements qui pouvaient m’être nécessaires ; malgré toutes les formes polies que j’employai pour arriver à mon but, je ne pus rien obtenir de raisonnable ; la réponse était toujours la même : « Puisque vous descendez dans la mine, vous pourrez juger si cela est beau ou non. »

Je sortis de l’hôtel, et m’adressant à un jeune garçon, je lui demandai de m’indiquer le chemin des mines. Au bout de vingt minutes de marche, il me laissa au milieu d’un sentier qui traversait une superbe prairie, et me montrant une maison qui se trouvait à une petite distance de là, il me dit : « C’est là le Rammelsberg. »

Le Rocher du Moine.

J’avais lu dans un guide du Harz que la végétation était complétement détruite aux environs des mines par les émanations arsenicales, et me trouvant entouré d’un paysage ravissant, je me vis dans une grande perplexité ; à tout hasard je m’acheminai vers la maison que mon jeune guide m’avait montrée et qui avait un aspect des plus riants : une haie parfaitement entretenue séparait la maison d’un verger plein de gros pommiers couverts de fruits magnifiques, et sous lesquels de belles vaches blanches étaient paisiblement couchées. Une porte en bois donnait accès dans un petit jardin dont le chemin principal conduisait à l’habitation ; les murs étaient d’une blancheur irréprochable, mais les persiennes vertes étaient d’un ton cru qui hurlait sous les tons rougeâtres des vignes vierges serpentant autour des fenêtres du premier étage. Ce calme absolu faisait ressembler l’habitation à celle d’un pasteur de village, et ne rappelait en rien l’animation bruyante qui caractérise ordinairement le voisinage de grands travaux industriels. Mon embarras fut plus grand encore quand, au lieu d’une figure de mineur que je m’attendais à voir, ce fut une dame qui m’ouvrit la porte et me pria d’entrer. Je m’excusai de mon mieux en lui débitant en allemand tous les mots de politesse que je connaissais, et je cherchai à lui faire comprendre que j’avais probablement été mal renseigné et que mon intention était de visiter les mines du Rammelsberg. Elle me prit des mains la permission que je m’étais procurée la veille à Goslar, la lut et m’introduisit dans un petit salon où elle me laissa seul. Au bout de dix minutes, elle revint accompagnée d’un mineur qui portait sous le bras le costume traditionnel destiné aux étrangers ; ma toilette terminée, on me fit traverser la cuisine et l’on me conduisit dans une chambre voisine où une nouvelle surprise m’était réservée : le mineur alluma sa lampe, alla dans un coin de la pièce, souleva une petite trappe large comme une cheminée, y descendit le premier et m’invita à le suivre ; puis la respectable dame ferma la planchette en me souhaitant un bon retour.

Lorsque je regardai sous moi, je vis à une assez grande distance déjà la lumière tremblotante de mon guide que je suivis machinalement en m’accrochant de mon mieux aux échelles posées droites le long des parois du puits. Cette première impression est très-désagréable : l’eau vous tombe en masse sur la tête ; les échelons, couverts d’une boue argileuse, semblent glisser sous la main ; de temps en temps le guide crie : « Il n’y a pas de danger, mais tenez-vous ferme !… » Ce