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des temples et des hypogées creusés de main d’homme dans le flanc des montagnes.

Les prodigieux hypogées de cette côte exerceront encore, pendant bien des années, la sagacité des savants. Quelques inscriptions que l’on a déchiffrées ont donné des dates précieuses ; des figures placides, semblables à des Bouddhas, ornent l’entrée de presque toutes les grottes, tandis que dans le sanctuaire la place d’honneur est presque toujours occupée par Siva ou ses attributs. Il semble donc que les auteurs de ces monuments aient voulu, sans heurter l’opinion des sectaires brahmistes de Siva, faire adopter Bouddha comme faisant partie de leur Panthéon, ou que Siva ait été représenté autrefois dans les poses que l’on attribue aujourd’hui à Bouddha, ce qui ressortirait du reste des écrits de Kalidassa.

Vishnou et Brahma ne sont, en général, représentés dans les sculptures gigantesques qui ornent les parois de ces temples qu’à l’arrière-plan, tandis que chaque tableau paraît représenter une des incarnations de Siva ou l’une des actions héroïques de sa vie. Vishnou et Brahma y sont toujours représentés sous le même aspect : Vishnou est supporté par Garouda sous la forme humaine, et Brahma est assis avec placidité sur une plate-forme que plusieurs cygnes emportent dans les espaces.

Le temple d’Éléphanta est situé sur une île à quelques milles de Bombay. Lorsqu’on veut visiter cette grotte, on peut prendre un bateau ou bonder-boat, au quai d’Apollon, et en quelques heures on arrive devant l’île où l’on trouve du côté du nord un débarcadère commode. On voyait autrefois un grand éléphant auprès de la plage : de là le nom de l’île.

Mariage de Siva et de Parvati. — Bas-relief des grottes d’Éléphanta. — Dessin de Thérond d’après une photographie.

Il faut, pour arriver au temple, monter un escalier de trois ou quatre cents marches, taillé presque à pic dans les flancs d’un morne ; cet escalier conduit à une terrasse de peu d’étendue, sur laquelle il y a maintenant un poste de police. Il n’est guère possible de douter que le temple d’Éléphanta n’ait été construit à l’époque où le bouddhisme n’était pas encore assez puissant pour se passer de l’appui de la religion sivaïte qu’il voulait remplacer, ou qu’il n’ait existé un compromis entre ces deux religions.

Dès que l’on est arrivé à cette plate-forme, on a devant soi l’entrée principale de la grotte, qui a été enlevée au ciseau dans une roche volcanique assez friable ; son axe est parfaitement tracé dans le plan de la méridienne. Cette entrée est supportée par deux piliers massifs qui la divisent en trois portes principales ; deux pilastres carrés, qui sont à droite et à gauche, servent de soutien aux parois du rocher ; quand on a pénétré dans l’enceinte, l’œil s’habitue peu à peu au demi-jour du temple, qui reçoit la lumière par deux cours qui le flanquent à l’est et à l’ouest : elles ont aussi été taillées au ciseau dans la montagne. L’imagination n’est d’abord frappée que de la symétrie des colonnes cannelées à chapiteaux hémisphériques qui supportent son vaste entablement.