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sionnaire en Cochinchine, et qui a visité un grand nombre de tribus sauvages, durant vingt années de missions. Je lui dois les remarques suivantes sur les dialectes d’un grand nombre de peuplades échelonnées dans le bassin du Mékong, entre la Cochinchine et le Cambodge au sud, le Tonquin et le Laos au nord ; je rapporte textuellement ses paroles :

« La plupart de ces dialectes, surtout ceux des Giraïes, des Redais, des Candiaux et des Penongs, ont entre eux des rapports si frappants, qu’on ne peut les considérer que comme des rameaux d’une même souche.

« Après un séjour de plusieurs années dans ces tribus, ayant été obligé, pour cause de santé, de faire un voyage à Singapour, je fus étonné, après quelque peu d’étude du malais, d’y trouver un grand nombre de mots djiaraïes, et un plus grand nombre encore, comme les noms de nombre par exemple, qui ont dans les deux langues la plus frappante analogie.

« Je ne doute pas que ces rapports se soient trouvés plus frappants encore par quiconque ferait une étude approfondie de ces langues, dont le génie grammatical est identiquement le même.

« Enfin, une dernière observation sur la ressemblance de la langue des Chams ou Thiâmes, anciens habitants de Tsiampa, aujourd’hui province d’Annam, avec celle des tribus du nord, me porte fortement à croire que ces diverses tribus sont sorties d’une même souche. »

Les renseignements que m’ont fournis les Stiêngs s’accordent parfaitement avec les remarques de M. Fontaine. — « Les Thiâmes, nous ont-ils dit, comprennent très-bien le giaraïe ; notre langue, à nous, a moins de ressemblance avec celle-là ; mais les Kouïs, qui se trouvent en amont du grand fleuve, parlent absolument la même langue que nous. » — Cette opinion est aussi celle de M. Arnoux, autre missionnaire en Cochinchine, qui a résidé longtemps au milieu des tribus sauvages du Nord et qui se trouve actuellement chez les Stiêngs.

Suivant ce prêtre érudit, auquel nous devons la latitude exacte de plusieurs points qui ont servi à établir notre carte, aussi bien qu’un grand nombre de renseignements topographiques sur le royaume de Cochinchine et les pays des sauvages, le siamois, le laotien et le cambodgien semblent être des langues sœurs ; plus du quart des mots, surtout ceux qui expriment des choses intellectuelles, sont les mêmes pour chacune d’elles. Ajoutons, et ceci est assez caractéristique, que le mot lao signifie ancien et ancêtre.

Vue du port et des docks de Bangkok, prise d’un bateau en face de l’église des Missions. — Dessin de Sabatier d’après M. Mouhot.

En 1670, le Cambodge s’étendait encore jusqu’au Tsiampa, mais toutes les provinces de la basse Cochinchine, qui lui appartenaient, telles que Bien-hoa, Digne-Theun, Vigne-Laon, Ann-Djiann, et Ita-Tienne, envahies