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de lumières et le léger souffle d’une fraîche brise emportent nos ennemis acharnés les moustiques, de nouveau les avirons se mettent en mouvement. Arrivés à un endroit où la rivière se divise, nous entrons dans un étroit ruisseau qui vient du sud-est et qui, tortueux comme un serpent, coule avec la rapidité d’un torrent. Ce cours d’eau, sur lequel s’élève Battambâng, n’a parfois que douze à quinze mètres de largeur ; les branches des arbres plongeaient dans notre bateau ; et d’énormes singes accrochés aux rameaux discontinuaient leurs jeux pour nous regarder passer. De temps à autre, quelque alligator, éveillé en sursaut par le bruit des rames ou les chants de nos rameurs, bondissait de la rive, où il dormait sur le sol humide, et s’enfonçait sous l’eau.

Tour de Banone, près de Battambâng. — Dessin de Thérond d’après M. Mouhot.

Enfin nous apercevons devant nous une bourgade dominée par les murailles en terre de ce qu’on appelle ici pompeusement une citadelle ; nous sommes à Battambâng, et comme partout c’est un prêtre français qui vient nous offrir l’hospitalité. Que M. Sylvestre reçoive ici l’expression de ma gratitude pour son bienveillant accueil et pour l’aide qu’il a prêtée a mes recherches de naturaliste et d’archéologue.

Il y a près d’un siècle que la province de Battambâng est soumise au Siam ; depuis ce temps, plusieurs fois elle a cherché à se soulever et même à se donner aux Annamites qui s’étaient emparés, il y a une vingtaine d’années, de tout le Cambodge ; mais ceux-ci furent repoussés par les Siamois jusqu’au delà de Penom-Penh. Depuis ce temps le Cambodge n’a pas éprouvé d’autre attaque des Cochinchinois, mais il est resté tributaire de Siam.

Sans la guerre que depuis deux ans la France fait à