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sentir de l’opportunité ou du contre-temps de la surprise, et avant tout de son caractère et de son éducation.


Les promenades.

Ce sont plutôt de véritables parties de campagne, les lieux de réunion en plein air étant fort éloignés de la ville et des principaux faubourgs qui l’environnent. On s’y rend, les dimanches et les vendredis, pendant la belle saison, en ambas ou en caïks avec toutes sortes de provisions de bouche. La plupart ont été choisies sur les charmantes rives européennes et asiatiques du Bosphore[1].

Sur quelques-unes des ces promenades publiques les sultans ont fait élever, pour l’usage des hanoums, des terrasses superposées en gradins, dominant des pièces d’eau et un espace aplani ou les djambazes et les peylévanns (acrobates et prestidigitateurs), les musiciens et les danseurs ambulants donnent des représentations publiques. Le patichach vient parfois avec ses courtisans passer une partie de la journée et éblouir un instant de sa personne les yeux des ses charmantes sujettes qui le récompensent de cette haute faveur par leurs acclamations enthousiastes et leurs ferventes bénédictions. Des beys, des pachas, de jeunes Musulmans riches circulent à cheval.

Le tandour (voy. p. 146). — Dessin de Pasini d’après le tableau de Mme Henriette Browne.

M. de Lamartine a fidèlement et admirablement décrit ces prairies émaillées de groupes innombrables de femmes levantines aux blancs yaschmacs[2], aux féredjés de mille nuances, et d’hommes aux costumes les plus variés ; il en a peint toute la poésie et tous les brillants plaisirs ; nous ne pouvons que conseiller aux lecteurs de relire ces belles pages du Voyage en Orient. C’est une féerie. Aucune de nos fêtes n’en a le prestige.

Au milieu de ces divertissements de toute sorte : spectacles, pantomimes, chants, danses, courses à cheval, cortéges, luttes, etc., quand viennent les heures des repas, les cercles des hanoums assises se resserrent, et baissant la partie inférieure de leurs yaschmacs, dégustent plusieurs services de mets délicats, tandis que les nègres ou à leur défaut les jeunes gens de la famille, les protégent contre toute indiscrétion des infidèles. Elles voient tout sans être vues, du moins de trop près.


Les bains.

Bien que dans presque chaque quartier il existe un établissement de bains publics à l’usage des femmes, ou que, du moins, celui des hommes leur soit cédé deux

  1. Tchamlidja, au fond du grand port ; Térapia ou Biyouk-Déré, ou Dolma-Bakhtché, sur les rives du Bosphore, ou les charmantes Îles des Princes, à l’entrée de la mer de Marmara.
  2. Mousseline très-fine encadrant en haut et en bas la figure, dont elle ne laisse à découvert que le nez seul ; en regardant les visages de près, il est aisé d’en distinguer les traits.