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Le traîneau en danger. — Dessin de Yan d’Argent d’après Atkinson.


VOYAGE SUR LES FRONTIÈRES RUSSO-CHINOISES ET DANS LES STEPPES DE L’ASIE CENTRALE,

PAR THOMAS-WITLAM ATKINSON.
1848-1854. — TRADUCTION INÉDITE.




Avant-propos. — Comment se peuple la Sibérie, et comment on y voyage.

Le 22 février 1848 un traîneau de voyage, renfermant M. et Mme Witlain Atkinson (les voyageurs mêmes dont nous allons suivre les traces)[1], arriva au galop de l’intérieur de Moscou devant la porte de cette ville qui s’ouvre sur la route de la Sibérie. Les barrières des villes russes sont formées par deux poteaux ou grandes poutres soutenant une grosse traverse mobile. On élève celle-ci chaque fois qu’on doit laisser passer une voiture ou un cavalier, puis on la laisse retomber immédiatement. Avant d’être admis et franchir cette sorte de joug ou de potence, le couple anglais dut faire vérifier ses passeports. « Si peu de temps que prit cette formalité, dit Mme Atkinson, ce moment suffit pour évoquer dans nos souvenirs les lamentables fantômes des nombreux proscrits pour lesquels cette barrière avait été la première étape de l’exil ; les uns accusés des plus grands crimes, les autres des plus minces délits, beaucoup simples victimes des caprices, de la brutalité ou des terreurs d’un maître, beaucoup aussi martyrs d’une foi héroïque.

« Pendant notre court séjour à Moscou, les familles de quelques déportés, sachant notre dessein de visiter prochainement des contrées où leurs pères, leurs maris et leurs frères gémissaient détenus depuis de longues années, avaient cherché à lier des relations avec nous. Cha-

  1. Les documents où nous avons puisé les colonnes suivantes sont au nombre de trois : Oriental and Wenstern Siberia, par Witlam Atkinson, 1858 : The Upper and Lowen Amour, par le même, 1860 ; Recollections of Tartar Steppes, par mistress Atkinson, 1863.