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Grotte de Mar-Georgious, près de Djébel. — Dessin de A. de Bar d’après un dessin de M. Lockroy.


VOYAGE EN SYRIE.

MISSION DE M. RENAN EN PHÉNICIE,

PAR M. E. LOCKROY.
1860. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


I

La Phénicie. — La ville de Djébel. — Gouvernement. — État des antiquités. — Fêtes à l’occasion des fouilles. — État du pays chrétien.

Les villes de Phénicie auraient été de pauvres villes et les Phéniciens de pauvres sires, si villes et gens avaient ressemblé à ce que nous voyons aujourd’hui. Jamais, je crois, décadence d’un peuple ne fut plus complète. Les Phéniciens modernes ont tout oublié, arts, commerce, navigation, écriture même. À peine quelques barques de pêcheurs s’abritent-elles dans leurs ports : le moindre coup de vent les effraye et les fait rentrer ; ce peuple de marins a peur de l’eau. On s’étonne en voyant les royaumes microscopiques qui composaient la Phénicie du rôle qu’ils jouèrent dans l’histoire. Les anciens ont tout vu par le gros bout de la lorgnette : le plus petit rocher leur semblait une montagne, un bouquet d’arbres une forêt, quatre bicoques une ville ; d’une mare ils faisaient un lac, et les ruisseaux de cette époque passaient pour fleuves, à bon marché. C’est, je crois, à leur imagination un peu ardente que la Phénicie doit en grande partie sa réputation. Ou les historiens de l’antiquité se sont bien monté la tête à son endroit, ou ses habitants ont singulièrement dégénéré.

La mission scientifique dirigée par M. E. Renan avait pour but de recueillir et d’étudier tout ce qui pouvait se rapporter à ce pays aussi célèbre que peu connu.