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la Mésopotamie, la Cilicie, la Syrie, la Palestine, étaient redevenues des provinces du royaume, ou des pays tributaires. Le roi Sennakhérib, qui emmena captives les dix tribus d’Israël, appartient à cette période. La Babylonie elle-même fut obligée à diverses reprises de reconnaître de nouveau la souveraineté de sa puissante antagoniste, ardente à venger, sans doute, l’humiliation qu’elle avait subie. Pendant un siècle les entreprises militaires des nouveaux rois ninivites s’étaient arrêtées au pied des montagnes qui séparent l’Assyrie de la Médie ; ils voulurent enfin franchir cette limite, que la nature a posée entre les contrées sémitiques et le monde iranien, et reconquérir l’ancienne prédominance assyrienne sur la haute Asie. Ce fut leur perte. Depuis le démembrement de 747, la Médie était devenue un grand royaume. Le roi des Mèdes, que les relations grecques nomment Cyaxarès, prit à son tour l’offensive, vint mettre le siége devant Ninive, l’emporta d’assaut, saccagea la ville, brûla les palais et les temples, et de cette cité splendide, une des gloires de l’Asie, ne fit qu’un monceau de ruines. Cette catastrophe eut lieu vers l’année 608.

Ce fut le dernier coup porté à la ville de Ninus et à l’antique monarchie dont elle était la capitale, elles ne s’en sont pas relevées.

L’Assyrie, qui durant tant de siècles avait tenu le sceptre de l’Orient, devint à son tour et resta une province de l’empire des Mèdes, — qui allait bientôt, sous Cyrus, devenir l’empire des Perses, — jusqu’au jour prochain où tous ces peuples et tous ces empires, Assyriens, Babyloniens, Mèdes et Perses, courbés sous le bras victorieux d’Alexandre, n’allaient plus faire qu’un seul empire et un seul peuple.

Et les tristes débris de ce qui fut Ninive, épars sur le sol vide d’habitants, lentement envahis par la poussière de la plaine et le limon du fleuve, se trouvèrent un jour complétement ensevelis sous ce linceul de terre que le temps étendait sur eux.

La grande salle du musée assyrien, au musée du Louvre. — Dessin de Thorigny.

Ce fut plus qu’une œuvre de destruction, ce fut une œuvre d’anéantissement et d’oubli. Le pâtre qui conduisait ses troupeaux à travers cette plaine ondulée sous laquelle gisaient les monuments dévastés des anciens rois, gardait à peine une vague tradition des magnificences de la cité royale.

Cette tradition même a fini par se perdre à travers les générations. La malédiction des prophètes fut accomplie. C’est de nos jours seulement que la ville oubliée a été retrouvée enterrée sous le sol, ignorée des habitants du pays, et sans qu’à la surface de la plaine rien autre chose en révélât la présence que les monticules mêmes formés par la terre amoncelée qui en recouvre les débris.