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Kouraï, Taïara, l’Abou Haraz. Un cinquième district fut formé de la capitale et de la banlieue. La capitale elle-même se forma lentement de l’agglomération de quelques villages originairement séparés par des terres cultivées : dans cet espace, on bâtit des casernes, une préfecture, une mosquée, des habitations de fonctionnaires, toutes constructions assez faciles à reconnaître aujourd’hui à leur style arabe, tandis que les anciens quartiers ne se composent que de toukouls (huttes rondes des Soudanies).

À Lobeid, du reste, bâtit qui veut un palais ou une chaumière : les matériaux sont à portée de la main et chacun est libre de les employer selon son goût et sur la place qui lui convient le mieux : on n’a pas à s’inquiéter des règlements de l’administration : l’alignement est inconnu. Mais si cette liberté a quelque avantage, il est aisé de comprendre qu’elle a aussi beaucoup d’inconvénients. Par exemple, à toute maison neuve correspond une large excavation que la saison des pluies remplit bientôt d’une eau croupissante. Tous les chiens, chevaux ou chameaux morts y trouvent une sépulture offensante pour la vue, l’odorat et l’hygiène : aussi Lobeid est-il la ville la plus malsaine du Soudan oriental et j’y gagnai ma première fièvre.

CONSEIL PROVINCIAL D’ABOU-HARAZ (voy. p. 28). — Dessin de Karl Girardet, d’après M. G. Lejean.


IV


Le Khor d’Abou-Haraz. ─ Le conseil en plein air. ─ Les pluies : ma maison croule sur les épaules. ─ La beauté nubienne. ─ Je pars pour le Haoudon.

Je me hâtai de quitter cette métropole empestée, et je partis un soir pour Abou-Haraz avec Antinori. C’était une excursion d’une cinquantaine de kilomètres, à travers un pays charmant, mais sans grand caractère. Nous ne trouvâmes un peu de nature tropicale qu’au khor d’Abou-Haraz, trois lieues avant la ville.

Un khor, au Soudan, est un de ces torrents qui, à sec pendant neuf mois de l’année, roulent pendant la saison des pluies des masses d’eau que le soleil boit le plus souvent avant qu’elles arrivent au Nil. Aussi les ramifications des khor sont-elles assez malaisées à déterminer, à moins d’une étude topographique que le voyageur a rarement le temps de faire. Le Kordofan, représenté jusqu’ici sur toutes les cartes, sauf une, comme un pays sans rivière, en est au contraire sillonné partout : je ne sais où vont les torrents du nord, mais ceux du sud se réunissent dans le lac de Cherkela, et de là, dit-on, au Nil. Le vallon d’Abou-Haraz, qui a des flaques d’eau dans les mois les plus secs, porte une végétation admi-