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rue un malheureux chien vint se jeter dans mes jambes en aboyant et, de cet instant, un pressentiment funeste s’empara de moi. Tout troublé, ]’arrive au palais Pisani, je demande à notre vieille servante si mon frère y est ?

« — Oui.

« — Par où est-il entré ?

« — Il a donné le tour. »

« Je donne le tour, je trouve la porte fermée. Un trait de lumière m’a frappé… tout mon sang se met en mouvement ; je fais une courte prière pour demander à Dieu du secours, et je revole à la première porte que j’essaye encore d’ouvrir avec ma clef. Je frappe, j’appelle… rien !

« Je m’élance comme un furieux sur la porte, que je brise avec effort ; je traverse un petit vestibule… j’enfonce la seconde porte comme la première… Grand Dieu ! quel coup de foudre ! mon pauvre Léopold étendu la face contre terre, au milieu d’un lac de sang !

Le petit palais Ferro. — Dessin de Thérond d’après M. A. de Beaumont.

« Pétrifié à cette vue, je tombe bientôt à genoux pour recevoir deux soupirs qui s’exhalaient de cette pauvre dépouille mortelle ; notre vieille bonne pousse des cris et des gémissements… je la supplie d’aller chercher des secours, et je reste seul. Je jette alors les yeux avec effroi sur ses mains pour chercher l’instrument cruel qui m’a ravi ce malheureux frère, et je le vois posé sur une malle, où le sang avait coulé d’abord et d’où Léopold était tombé après avoir fait son coup infernal… »


Murano. — Torcello. — Adieux à Venise.

L’île de Murano n’est pas loin de Saint-Michel, et quoique la fabrication du verre soit bien loin d’être ce