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Adoration des images en Sibérie (voy. p. 226).



DE KIEW À BÉRÉZOV,

SOUVENIRS D’UNE EXILÉE EN SIBÉRIE,


PAR Mme ÈVE FÉLINSKA.
1839. — TRADUCTION ET DESSINS INÉDITS[1]


Bérézov. (Suite.)

1er juin. — C’était provisoirement que nous nous étions logées chez la mère de notre gardien, mais notre intention était bien de suivre les conseils que nous avait donnés le colonel Krzyzanowski ; nous cherchâmes donc la maison qu’il avait habitée ; cette maison était convenable et nous conclûmes bientôt notre marché, qui comprenait l’appartement, la table et le service. Nos chambres étaient parquetées et tapissées d’un papier assez propre.

2 juin. — Rien ne manquait à notre modeste mobilier ; il y avait même plus de meubles que nous n’étions en droit de l’exiger ; je le fis remarquer à notre hôtesse, qui me dit : « Mais, madame, ce canapé, ces chaises, ces bons fauteuils sont venus avec vous. Je compris alors qu’une ingénieuse bonté nous protégeait encore dans l’absence. Onuphre Pietraszkiewicz s’était privé de ses meubles, les avait fait placer sur le navire, sans que nous nous en fussions doutées. Les cœurs qui ont souffert possèdent des trésors de bonté et de délicatesse, ceux qui ont pleuré sécheront vos larmes ou ils en adouciront l’amertume ; ils savent plaindre, ils peuvent consoler. Pietraszkiewicz, qui vivait de son travail, trouvait encore le moyen de soulager la misère des autres.

Notre hôtesse était simple et hospitalière ; elle nous entourait de soins et de prévenances, chaque jour elle nous faisait de nouvelles friandises et, en général, notre table était confortablement servie, si j’en excepte certains mets d’une saveur impossible, tels que les canards farcis de hachis aigre et cuits dans une crème épaisse.

  1. Suite et fin. — Voy. page 209 et la note.