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plus le terrain, mais ils courent toujours. On lâche un relais de nouveaux lévriers, portés en travers sur les chevaux ou dans des paniers. Le dénoûment favorable dépend de la bonne entente des forces de la terre et de l’air. Au milieu du troupeau des gazelles, le faucon choisit sa victime ; les chiens, qu’il précède, se guident sur lui : il gagne, il atteint, sa serre terrible s’appesantit sur la tête de l’animal, dont la vue est obscurcie par le battement réitéré de ses ailes. La gazelle chancelante, retardée, cherche en vain, par des mouvements désordonnés, à se débarrasser du poids qui l’obsède, et à rejeter l’oiseau implacable dont la férocité augmente à mesure que les forces de la victime diminuent. Cependant, les chiens arrivent et attaquent les jambes de derrière, en présence des cavaliers les plus lestes, qui assistent à l’agonie du pauvre animal dont le faucon a déjà mangé les yeux.

Si le faucon ne donne pas jusqu’au bout, et si l’on n’a pas de relais, il faut rappeler les chiens, que les gazelles fatigueraient inutilement.

On explique cette habitude du faucon d’attaquer d’abord les yeux de la gazelle, par la manière dont il est dressé à la chasse : le fauconnier emploie, d’ordinaire, un animal empaillé dont les orbites sont remplis de viande ; l’oiseau décoiffé s’abat sur la tête du mannequin et trouve sa nourriture aux yeux de cette victime inerte.

Jeune Illyate de Véramine. — Dessin de M. le commandant Duhousset.

Dans la chasse à l’affût, dès que l’animal a été reconnu, les tireurs se rangent sur une partie de courbe dont les gazelles occupent le centre. Ils se cachent le mieux possible, à plat ventre, derrière de petites broussailles épineuses, seule végétation rabougrie qui perce la nappe de sable, en ayant soin d’observer le plus grand silence. Le reste de la troupe décrit lentement la seconde partie de la courbe et appuie à distance, de manière à rabattre le gibier sur la zone occupée par les chasseurs couchés. Ce n’est pas sans émotion que l’on voit le joli et svelte quadrupède s’avancer sans défiance jusqu’à ce que l’œil puisse en saisir jusqu’aux moindres mouvements. Cette gazelle de Perse est une espèce d’antilope de la taille du chevreuil, dont le cou, le dos et l’extérieur des membres sont fauve clair, le ventre et le train de derrière d’un beau blanc ; la tête, armée de cornes noires et aiguës, est fauve et grise ; les yeux paraissent d’autant plus grands, qu’ils sont cernés d’une bande blanchâtre.