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en satin lamé, des toques ornées de marabouts, des turbans surmontés d’aigrettes, des colliers de perles, des boucles d’oreilles en brillants, des bagues à tous leurs doigts, sans compter les montres avec chaîne et breloques, les broches et les cassolettes, les mouchoirs de poche en guipure et les éventails pailletés.

Devant ces splendeurs complaisamment étalées aux regards de la foule, l’étranger venu dans le pays pour y chercher fortune, s’étonne que les tire-laines d’Arequipa, et le nombre en est grand au dire des boutiquiers et des étalagistes, n’aient pas encore songe à exploiter cette riche mine. Il se demande quel scrupule ou quel motif peut retenir oisives au fond de leurs poches les mains de ces industriels. Le motif ? — c’est leur terreur respectueuse à l’endroit des choses bénites. — Pour le huaso, le cholo, l’homme de la plèbe, égorger son semblable n’est rien ou presque rien, mais voler un bout de cierge dans une église, voilà ce qu’il n’a jamais fait, ce qu’il n’oserait faire, par crainte de l’enfer et de la géhenne éternelle. — Une foi pareille, convenons-en, est bien admirable ! Malheureusement cette foi profonde sera tôt ou tard ébranlée ; un jour viendra, s’il n’est déjà venu, où ces autochtones, civilisés par le contact des paquebots, des bateaux à vapeur et des câbles transatlantiques, chercheront à égaler nos filous d’Europe, — et pour leur coup d’essai feront un coup de maître, comme dit à peu près l’illustre Corneille.

Église de San Francisco, à Arequipa.

Les églises d’Arequipa, maintes fois détruites et réédifiées, comptent à cette heure deux siècles et demi d’existence. Seule la cathédrale, qui occupe tout un côté de la plaza Mayor, date d’une dizaine d’années ; elle a été construite sur l’emplacement de l’ancienne église,