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compléta, un corps vint l’accompagner ; d’autres sculptures s’y ajoutaient : plus de doute, on tenait le commencement d’une série de bas-reliefs, le mur d’un édifice dont on avait attaqué l’un des angles.

Village arabe de Khorsabad (Ninive).

Ces premiers résultats étaient encourageants ; ils devaient en faire espérer d’autres, et, d’après la forme, comme d’après l’étendue du monticule de Khorsabad, il y avait toute raison de penser que ce qui restait à découvrir était de beaucoup plus important que ce qu’on avait trouvé jusqu’alors. Mais comment fouiller tout ce sol occupé par les maisons du village ? On avait un firman qui permettait l’expropriation des habitants ; avec de l’argent on pouvait les dédommager. On était donc en mesure de procéder aux travaux nécessaires pour suivre les indications fournies par les premières excavations. Cependant déplacer des Arabes de chez eux, gêner leurs habitudes domestiques, exproprier des musulmans au profit des chrétiens pour ouvrir, sous leurs pieds, une terre du sein de laquelle on allait exhumer, des œuvres du démon, eût été affronter de graves difficultés, et s’exposer peut-être à des conflits fâcheux, si une circonstance toute favorable ne fût venue en aide pour diminuer les obstacles. Depuis assez longtemps déjà les habitants de Khorsabad désiraient quitter l’éminence au sommet de laquelle ils s’étaient établis, et descendre dans la plaine pour se rapprocher d’une petite rivière qui coulait à quelques pas de là. En Orient, tous les travaux de ménage, sans exception, sont abandonnés à la femme, et quelque pénible qu’un de ces soins puisse être, un musulman ne le lui évite jamais ; il croirait déroger à son rang, comme chef de famille, et manquer à sa barbe, comme homme. Parmi les charges qui incombent ainsi aux femmes, est celle de fournir la maison d’eau. Celles de Khorsabad devaient descendre du village dans la plaine, et après avoir rempli leurs outres, les porter sur les épaules et remonter péniblement les pentes du monticule. C’était une grande fatigue qui n’était pas supportée sans murmures, et les maris s’étaient décidés à l’éviter à leurs femmes en se rapprochant du ruisseau. Ce fut là l’occasion dont nous profitâmes, et grâce à cette circonstance, grâce aux quelques piastres qu’on donnait pour chaque maison renversée, le terrain fut facilement déblayé. Le prix d’une expropriation n’était pas élevé, mais il était tout bénéfice pour les villageois, attendu que leur manière de construire est aussi économique qu’expéditive. Ils gâchent de la terre avec de l’eau en y mêlant quelques brins de paille ; ils mettent cette espèce de mortier dans de petits moules en bois pour lui donner une forme de briques ; i ils laissent sécher à l’air ces carrés qui ne sont d’abord qu’une pâte molle, mais qui, sous l’action d’un soleil ardent, acquièrent bientôt une dureté presque égale à celle de