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plie de 1857 à 1859, et dont le premier volume a été publié récemment à Vienne ; cela se conçoit, c’est son premier pas dans la carrière des explorations maritimes. Autant qu’on en peut juger par cette première partie de la relation et par les rapports connus de l’ensemble du voyage, les observations recueillies ne manqueront pas d’intérêt pour la science, sans y rien apporter d’absolument nouveau. L’ethnographie a eu une part notable dans les travaux de la commission autrichienne.


XIV

Nouvelles expéditions polaires.

Après la solution définitive du problème de la communication polaire entre l’Atlantique et le grand Océan, par l’expédition du capitaine Mac Clure (1850), et les longues péripéties de la recherche du capitaine Franklin, on pouvait croire que la série des navigations arctiques était close, pour longtemps du moins ; et voilà que trois expéditions s’annoncent coup sur coup. Deux de ces expéditions sont américaines. La première a été organisée par M. Hall, de Cincinnati ; elle a pour objet d’aller rechercher s’il n’existe pas des restes de l’expédition Franklin autres que ceux qui ont été retrouvés. M. Hall a dû hiverner de 1860 à 1861 sur la côte occidentale du Groenland, par soixante-deux degrés cinquante et une minute trente secondes de latitude. La seconde expédition, conduite par le docteur Hayes, se proposait un but plus sérieusement scientifique. Elle voulait vérifier s’il existe, comme le croit le docteur Kane, une mer ouverte aux approches du pôle. Mais on annonce que l’expédition vient de rentrer à Halifax (à la date du 9 octobre) sans avoir pu accomplir sa tentative, tous les chemins s’étant trouvés fermés par les glaces. On s’est néanmoins élevé jusqu’au quatre-vingt-unième degré trente-cinq minutes. La troisième expédition est suédoise. Organisée en partie aux frais de l’Académie de Stockholm sur de plus grandes proportions que celles du docteur Hayes, elle se proposait peu près le même objet. Elle a mis à la voile de l’île de Tromsoe, en Norvége, le 8 mai dernier. Elle devait gagner directement le Spitzberg, et là l’expédition se partager : un des deux bâtiments qui la composaient devait faire une reconnaissance complète de l’île, et tâcher en outre d’y établir une base pour la mesure d’un arc du méridien ; pendant ce temps, l’autre bâtiment, reprenant la mer, devait pousser droit au nord pour arriver au pôle ou en approcher autant que possible. On vient d’annoncer tout récemment que cette dernière partie du problème n’a pu être remplie. Cette expédition, qui se rattache, on le voit, à la physique du globe, est rentrée le 23 septembre à son port d’armement.


XV

Des investigations archéologiques, et de leur importance pour l’histoire et la géographie.

Quelques mots encore, en terminant, d’un ordre de recherches qui, sans avoir un caractère particulièrement géographique, n’en apportent pas moins de précieuses données à la géographie aussi bien qu’à l’histoire du monde ancien. On comprend que nous voulons parler des investigations archéologiques. Notre temps en a exploré deux foyers importants, l’Égypte et l’Assyrie. Le site exhumé de Ninive, et ceux de deux résidences royales des anciens souverains d’Assour, nous ont livré des ruines d’une vaste étendue, et un nombre immense d’inscriptions en caractères cunéiformes. Le Tour du monde dira très-prochainement quels résultats le déchiffrement de ces inscriptions a déjà donnés pour la restitution de la vieille géographie assyrienne.

Ceux que l’on doit à la lecture des inscriptions hiéroglyphiques des bords du Nil sont plus abondants encore, et ont été déjà l’objet de nombreux travaux d’élucidation. On sait quels trésors ont rapportés de leurs investigations successives les diverses expéditions et les commissions scientifiques qui depuis soixante-trois ans ont fouillé tour à tour cette terre des vieux souvenirs et des vieux monuments : Champollion après la commission d’Égypte, le docteur Lepsius après Champollion, M. Brugsch après le docteur Lepsius ; puis après tant de fouilles et de découvertes qui ont à peine effleuré le sol, loin de l’avoir épuisé, est venue la mesure si libérale du vice-roi actuel, Mohammed-Saïd, qui a créé, en 1858, une inspection générale pour le déblayement et la conservation des monuments de l’Égypte, et qui a investi de ces fonctions importantes notre savant compatriote M. Mariette. Cette création ouvre une ère nouvelle aux études de l’Égypte ancienne. Déjà les travaux dirigés par M. Mariette ont fait retrouver de précieux débris de l’antiquité pharaonique. En reprenant le déblayement d’une des salles du grand temple de Karnak, sur le site de Thèbes, il a déterré la fin d’une immense inscription ou le roi Touthmès III, qui régnait aux environs de l’an 1600 avant notre ère, près de trois siècles avant Moïse et l’exode des Hébreux, raconte, année par année, ses expéditions et ses conquêtes en Éthiopie, dans l’Arabie méridionale, dans la Syrie et dans les contrées de l’Euphrate. M. de Rougé, notre profond égyptologue, a commencé au sein de l’Académie des inscriptions la lecture d’un long mémoire sur la géographie de cette inscription de Touthmès.

On sait quel retentissement ont eu depuis six mois les fouilles dirigées par M. Renan dans l’ancienne Phénicie. Ces fouilles, cependant, n’auront peut-être pas donné tout ce qu’on avait cru pouvoir en attendre. Elles fourniront des matériaux d’un grand prix pour l’histoire de l’art tyrien ; mais on n’a pas trouvé une seule inscription phénicienne. Ces fouilles donneront donc bien peu de chose à l’histoire, et rien à la géographie.

Il n’en est pas ainsi du voyage archéologique qu’un savant prussien, M. le docteur Hübner, fait en ce moment en Espagne. Il est bien peu d’excursions de ce genre qui aient été aussi riches en résultats. Les courses de M. Hübner ont commencé au mois de mars de l’année dernière, et depuis cette époque il a visité toutes les provinces de l’est et du sud de l’Espagne, depuis la Catalogne jusqu’à l’Andalousie. Le savant épigraphiste re-