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Cette jolie petite île, appelée aussi île de la Réunion, est située entre Maurice et Madagascar, entre vingt degrés cinquante et une minutes et vingt et un degrés vingt-cinq minutes de latitude sud, et la longitude orientale de son grand diamètre est cinquante-deux degrés cinquante-huit minutes et cinquante-trois degrés trente-huit minutes. Elle a quarante milles anglais de longueur et trente milles de largeur, et compte environ deux cent mille habitants.’

Découverte l’an 1545 par le Portugais Mascarenhas, occupée en 1642 par les Français, elle fut soumise de 1810 à 1814 à l’Angleterre, et lors de la paix générale, elle a fait retour à la France.

L’île Bourbon a de belles chaînes de montagnes et de vastes plaines qui s’étendent le long de la mer. Ses parties basses sont plantées de cannes à sucre qui y viennent admirablement et qui donnent à l’île un aspect d’une extrême fraîcheur et d’une prodigieuse fertilité.

Je ne vis tout cela que du pont, car nous ne restâmes que peu d’heures, et elles furent employées aux formalités d’usage : visites du médecin, de l’officier de la station, de la douane, etc. Ces formalités à peine accomplies, la vapeur se remit à siffler, les roues à entrer en mouvement, et nous reprîmes la route de l’île Maurice, éloignée de cent milles.

Le lendemain nous avions perdu depuis longtemps de vue l’île Bourbon, et nous apercevions déjà l’île Maurice, où, dans l’après-midi, notre vapeur était amarré à Port-Louis, capitale de l’île. Mais il fallut attendre trois heures avant de pouvoir débarquer. Je descendis dans la maison de campagne de M. Lambert.

L’île Maurice offre, de la mer, à peu près le même aspect que Bourbon ; seulement les montagnes sont plus escarpées et étagées en plusieurs chaînes. La ville ne se présente pas si bien que Saint-Denis ; il lui manque surtout les grands et superbes édifices qui donnent tant de charme à cette dernière.

L’île Maurice, appelée autrefois île de France, est située dans l’hémisphère austral, par vingt degrés et vingt degrés trente minutes de latitude et entre cinquante-cinq degrés et cinquante-cinq degrés vingt-cinq minutes de longitude. Elle a trente-sept milles anglais de longueur, vingt-huit milles de largeur, et compte cent quatre-vingt mille habitants.

Maurice, comme Bourbon, appartient géographiquement à l’Afrique. Elle fut occupée par les Hollandais en 1576, mais elle passe pour avoir été découverte plus tôt par le Portugais Mascarenhas. Les Hollandais lui donnèrent le nom de Maurice, mais l’abandonnèrent de nouveau en 1712. Trois mois plus tard, les Français s’en emparèrent et l’appelèrent île de France. En 1810, elle fut prise par les Anglais, qui l’ont gardée depuis et lui ont rendu le nom de Maurice.

L’île était inhabitée quand on la découvrit. Les blancs y introduisirent des esclaves : des nègres, des Malabares, des Malgaches, dont le mélange amena dans la suite des variétés de races de tous genres. Depuis l’abolition de l’esclavage en 1825, on fait venir presque tous les travailleurs de l’Inde. Le gouvernement de l’Inde anglaise conclut des marchés de cinq ans avec les individus qui veulent prendre du service à Maurice. Après l’expiration de ce terme, ils peuvent demander à être renvoyés dans leur pays aux frais du gouvernement. Ceux qui ne se présentent pas perdent leur droit à la traversée.

Le maître doit payer au gouvernement pour tout ouvrier, la première année, deux livres sterling, et chacune des années suivantes, une livre sterling. Cet argent couvre les frais de transport, aller et retour. Quant à l’ouvrier, le maître est tenu de lui payer par mois cinq à six roupies (de douze à quinze francs), de le loger et de le nourrir. C’est là la taxe du journalier ordinaire ; pour les cuisiniers, les artisans, le salaire s’élève beaucoup plus haut, en proportion de leur habileté et de leur talent.

Je trouvai les habitants de Maurice dans une très-grande agitation. On venait d’apprendre de Calcutta qu’on y avait défendu l’embarquement des ouvriers, par la raison qu’ils étaient trop maltraités en quarantaine. Cependant l’administration locale était décidée à remédier avec tout le soin possible aux abus actuels de la quarantaine, et l’on espérait voir bientôt révoquée une interdiction qui, en se prolongeant, précipiterait l’île en peu d’années vers sa ruine.

Aujourd’hui elle est dans l’état le plus prospère ; les revenus qu’elle rapporte aux colons et au gouvernement sont plus considérables proportionnellement qu’ils ne le sont peut-être nulle part ailleurs. Ainsi, en 1855, il a été produit deux millions et demi de quintaux de sucre, dont la valeur s’élevait à un million sept cent soixante-dix-sept mille quatre cent vingt-huit livres sterling ; le revenu du gouvernement montait, la même année, à trois cent quarante-huit mille quatre cent cinquante-deux livres sterling. Les dépenses avaient été de beaucoup inférieures, et comme il en est de même presque tous les ans, et que le surplus ne passe point en Angleterre, mais reste dans le pays, la caisse publique est toujours abondamment pourvue d’argent. Elle possède, dit-on, en ce moment trois cent mille livres sterling ; et chaque année voit croître la prospérité de cette île fortunée. En 1857, les revenus du gouvernement augmentèrent de cent mille livres sterling, par le seul produit d’un nouvel impôt sur les spiritueux. Les habitants firent aussi de grands bénéfices, comme le constate la différence entre l’exportation et l’importation. En 1855, la première l’emporta sur la dernière d’un demi-million de livres sterling. Que ne peut-on dire la même chose de beaucoup de grands États de l’Europe !

Les employés du gouvernement sont très-bien payés, mais ils touchent bien moins d’appointements que dans l’Inde anglaise, quoique la vie de Maurice soit infiniment plus chère. La cause en est que le climat de l’Inde est regardé comme très-malsain pour les Européens, tandis que celui de Maurice ne l’est pas. Le gouverneur, logé aux frais de l’État, reçoit six mille livres sterling par an.

La maison de campagne de M. Lambert, appelée les Pailles, où je descendis, est à sept milles de la ville,