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partie occidentale du Sahara algérien : Zouargla, Tougourt, Temacin, El-Oued ; il a exploré le Sahara tunisien : Nefta, Tozer, Gabès ; il est revenu à Tougourt, d’où il est parti pour Gadhamès et Rhat, avec une escorte de Touaregs.

« Je ne pouvais, a-t-il écrit, m’empêcher d’admirer ces chevaliers des temps modernes, montés sur leurs dociles et légers dromadaires, marchant silencieux et immobiles sur leurs selles comme des fantômes. J’admirais aussi les qualités de cœur et l’intelligence du cheik Othman, leur chef. Il me racontait les projets de sa vieillesse et me disait : « Si Dieu m’avait donné des enfants, je les aurais élevés et instruits, et j’aurais ainsi laissé un souvenir de moi à la postérité ; mais Dieu ne m’en a pas donné, et je ne veux pas cependant mourir sans avoir fait quelque chose d’utile ; je creuserai des puits dans les déserts les plus difficiles à traverser, et principalement sur la route du pèlerinage. » Le bon cheik verra peut-être un jour que ce qu’il fait aujourd’hui, en servant d’intermédiaire entre les Touaregs et en travaillant à les rapprocher de nous, sert bien plus à la postérité que les quelques puits qu’il projette, et que personne mieux que nous ne saura les creuser. Mais ce trait fera connaître un peu le caractère de l’homme auquel je suis associé. »

Avant de s’enfoncer dans le grand désert, M. Henri Duveyrier avait pu, pendant un court séjour à Tripoli de Barbarie, visiter la chaîne montagneuse de cette grande oasis assise au bord de la mer. Les dernières nouvelles annoncent l’arrivée de M. Henri Duveiyrier à Rhat en compagnie du chef targui Ikhenoukhen. Ils devaient partir ensemble pour Mourzoug, capitale du Fezzan. De Mourzoug, le voyageur compte revenir à Alger, soit par la voie maritime de Tripoli, soit directement par Ouergla, afin de s’équiper pour une exploration lointaine et d’organiser des moyens de correspondance et d’approvisionnement plus réguliers que ceux improvisés depuis un an. Autant nous recevons facilement ses lettres, quoiqu’elles mettent toujours deux mois au moins à nous parvenir, autant les courriers qu’on lui expédie éprouvent de difficultés pour le trouver, attendu sa mobilité continuelle.




« Tuggurt ou Tougourt, dit M. O. Mac Carthy (dans la Géographie physique, économique et politique de l’Algérie), capitale de l’Oued-Rir, est une ville considérable, et d’un grand renom dans le Sahara. Elle est bâtie au milieu d’une plaine légèrement ondulée, et son enceinte de murs a la forme assez singulière d’un cercle, précédé d’un large fossé. Ses habitants, au nombre de trois mille, comme tous les gens du désert, cultivent leurs dattiers et font un commerce actif, tandis que les femmes fabriquent différents tissus de laine et de soie. Tougourt est à deux cent vingt kilomètres au sud de Biskra.

Boutiques à Tougourt (Oued-Rir). — Dessin de A. de Bar d’après une photographie de M. le docteur Puig.

Tougourt, au moment où on l’occupa, le 2 décembre 1854, était gouvernée depuis 1415 par la famille des Ben-Djellab. Le pouvoir indigène s’y débattait alors au milieu de dissensions intestines qui ont nécessité l’intervention de la France, » dont le drapeau flotte depuis lors incontesté sur les murs de Tougourt et dans toutes les localités de l’Oued-Rir. »