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pittoresque. Chevaux de rechange, chargés de paquets de toute sorte, voitures de bagages, télégas, tarantasses, calèches appartenant aux officiers, formaient une longue ligne entourée d’une escorte, que suivait en bon ordre le reste du régiment, la lance au bras. C’était un admirable sujet de tableau, mais d’ailleurs tout ne l’est-il pas dans ce pittoresque pays du Caucase.

Mtskheta, où nous arrivâmes peu après cette rencontre, jadis d’une grande importance en Géorgie, dont elle fut la capitale jusqu’au sixième siècle, n’est plus maintenant qu’une bourgade, dont peut-être on ne se rappellerait plus la splendeur passée sans sa belle église, sépulture des rois de Géorgie, qui reste encore debout au milieu de l’enceinte carrée crénelée au long de laquelle une longue suite de bâtiments, en partie détruits, servaient jadis de demeure aux patriarches ainsi qu’aux moines de ce monastère révéré.

Je ne puis mieux faire que de citer pour la description de cette église ce qu’en dit l’auteur des Lettres sur le Caucase, M. de Gille, à qui l’on doit recourir toutes les fois que l’on voudra avoir une idée exacte de ce pays, qu’il a parcouru en savant et en artiste.

La forteresse d’Ananour. — Dessin de Blanchard.

« L’ancienne cathédrale de Sveti-Tzkhoveli, dont les premiers fondements furent jetés par Miriam, roi Sassanide, qui devint chrétien vers l’an 318, à la voix de sainte Nina, fut détruite de fond en comble. Le roi Alexandre, au commencement du quinzième siècle, reconstruisit l’église sur le plan de l’ancienne. C’est un modèle parfait des églises du style géorgien, avec son dôme, surmonté au lieu d’une coupole, d’une toiture ronde terminée en pointe et ses murailles ornées de figures d’ange volant dans une attitude renversée et de détails architectoniques parmi lesquels se distinguent des moulures en encadrement, des figures d’animaux, et des ceps de vigne. La pierre est une espèce de porphyre vert rougeâtre.

« Les rois de Géorgie y étaient couronnés et ensevelis ; c’était leur Saint-Denis ; ils y reposent sous des pierres funéraires qui parsèment le pavé de l’église. On y distingue des inscriptions à demi effacées[1]. Les tombes des deux derniers rois de Géorgie, Héraclius et George, sont des deux côtés de l’iconastase. Elles ont été restaurées sous le règne de l’empereur Alexandre Ier.

« Le vrai souterrain de l’église est dans une chapelle que l’on me montra à droite de la grande entrée sur le lieu de la sépulture de la sœur du centurion Longin[2] qui y fut ensevelie avec le fameux khiton.

  1. Dans son Voyage archéologique en Transcaucasie, M. Brosset a réuni et traduit ce qui reste encore lisible des inscriptions de Mtskheta.
  2. Suivant la légende géorgienne, le centurion Longin reçut dans le partage des vêtements du Sauveur le khiton, la robe sans