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Une forte palissade faite de pieux hauts de trois à quatre mètres entoure le Quartel : l’espace qu’elle renferme est un carré dont les côtés ont quatre-vingts mètres, avec des angles en pan coupé, garnis d’un banc sur lequel se place une sentinelle dont la tête seule dépasse le sommet de l’estacade. Une espèce de cage, élevée sur une poutre gigantesque, domine au loin la campagne. De jour, un soldat s’y tient ; mais il en descend vers le soir, car par une nuit obscure les sauvages pourraient l’atteindre de leurs flèches en dépit de sa vigilance.

La garnison se compose de vingt-cinq hommes pris dans toutes les armes, mais le plus ordinairement parmi les lanciers. Tous les deux mois elle relève le détachement placé près du fleuve, que sa faiblesse numérique, son isolement, et l’absence de clôture autour du rancho qu’il occupe, astreignent à un service de surveillance incessant et fort pénible.

Indiens Tobas. — Dessin de J. Pelcoq d’après M. Demersay.

Il y aurait, en effet, de l’imprudence à se fier aux dispositions pacifiques des Indiens et à leurs démonstrations amicales. Si leurs agressions ne sont pas continuelles, si des années s’écoulent souvent sans qu’on ait à leur reprocher même une tentative de vol, tout à coup, profitant de l’obscurité profonde d’une nuit tempétueuse, ils apparaissent en bandes nombreuses, poussent le cri de guerre, et lancent une grêle de flèches sur les sentinelles : puis ils se retirent en enlevant tout ce qu’ils peuvent réunir de troupeaux.

Ces brigandages périodiques n’empêchent pourtant pas certaines relations de s’établir entre la garnison et ses irréconciliables ennemis. Parmi les tribus, il en est d’ailleurs qui portent aux blancs une haine moins vivace : de