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Saint-Louis, chef-lieu des établissements français du Sénégal. — Dessin de M. E. de Bérard d’après Nouveaux.


VOYAGES ET EXPÉDITIONS AU SÉNÉGAL ET DANS LES CONTRÉES VOISINES[1].


LE SÉNÉGAL.
1447 — 1860


Découverte du fleuve et de la contrée qui portent le nom du Sénégal. — Coup d’œil rétrospectif sur leur histoire. — Où peuvent mener les coutumes. — Valeur de ce mot au Sénégal.

Le navigateur qui descend du nord le long de la côte occidentale d’Afrique ne doit pas s’attendre à y retrouver, au sud de l’empire de Maroc, les grands aspects de terre et d’eau, les beaux paysages, les échappées sur l’Atlas neigeux, qu’il a pu contempler de loin en loin entre le cap Spartel et la baie d’Agadir. Dès qu’il a doublé le promontoire de Nun, borne redoutable des anciennes navigations, il ne voit plus à sa gauche qu’une haute falaise de roche nue dont un violent ressac ronge incessamment la base, dont un implacable soleil calcine incessamment la crête. C’est la bordure maritime du grand désert, le rempart qu’il oppose aux longues lames et aux courants de l’Atlantique. Ceux qui ont escaladé cette muraille du Sâh’ra, des naufragés pour la plupart, n’ont contemplé de l’autre côté de ses escarpements qu’une surface unie, lugubre comme celle de la mer par un calme plat ; un horizon sans bornes, une plaine immense, brûlante, aride, sans verdure, sans un buisson, un brin d’herbe, sans la moindre ressource qui soit de nature à prolonger l’existence d’un être humain jeté dans ce déplorable milieu. Aux environs du cap Blanc, cette falaise, longue déjà de plus de mille kilomètres, s’abaisse et fait place à une chaîne de dunes. Celle-ci, qui diminue graduellement en hauteur et en importance à mesure qu’elle se rapproche du sud, vient enfin s’amoindrir et se perdre, vers le seizième degré de latitude nord, dans une longue et mince langue de sable, à travers laquelle un grand fleuve, issu des vraies contrées tropicales de l’Afrique, se fraye un passage dans l’Océan. Ce fleuve est le Sénégal, qui donne aujourd’hui à une grande et belle contrée un nom qu’il doit à la peuplade berbère Zénaga établie sur sa rive droite alors que le navigateur portugais Lancerote ou Lancelot le découvrit en 1447.

Les rives de ce même fleuve ont-elles abrité l’expédition de découvertes que, six ou huit siècles avant notre ère, le Carthaginois Hannon conduisit au delà du détroit des Colonnes ? Les cartographes peuvent-ils identifier ce cours d’eau avec le Stachyris de Ptolémée ? Ce sont là des questions que l’on a longuement agitées au temps de

  1. Cette livraison et les deux suivantes (relations, études et appréciations), sont entièrement extraites de documents officiels publiés depuis 1857 par le ministère des colonies.