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déjeuner dans la salle d’un fondaco formant à la fois chambre à coucher, salle à manger, cave, etc., j’ai retrouvé les grottes sépulcrales creusées dans les rochers.

Galatagirone, située sur une hauteur conique, est peuplée de 22 000 habitants. J’ai vu dans ses églises des tableaux du Sicilien Nebrone, des fresques et des toiles de Paladino, une belle vierge de Gagini, etc.

Les vignes, fort abondantes jusqu’à Ramecchiere, disparaissent ; on traverse un pays volcanique, au milieu duquel se dresse, sur un rocher escarpé, la ville de Vizzini, qui n’est accessible que par des sentiers étroits, péniblement pratiqués auprès des ravins, et où le voyageur se procure difficilement un gîte. Cependant elle renferme 12 000 habitants, et j’ai remarqué dans ses églises de beaux tableaux, entre autres quelques-uns du Tintoret et de Paladino.

Au delà, en cheminant vers Sortino, par Bocchieri, l’aspect du pays devient de plus en plus sombre.

Un petit bois, poussé, je ne sais comment, sur les crêtes et les rochers, annonce l’approche de Sortino, bourg misérable, élevé lui-même sur un sommet qui semble inaccessible. J’y parvins cependant, après avoir guidé de mon mieux ma mule dans un chemin glissant, taillé en forme d’escalier et contourné de mille manières.

Rocher de Scylla (voy. p. 16). — Dessin de Rouargue.

Lorsque je fus installé dans une pauvre locanda, il me fallut subir la curiosité qui m’avait accueilli dans toutes les petites localités de la Sicile ; la porte et la fenêtre de ma chambre ne faisaient qu’une seule et même chose ; je me vis obligé de m’emprisonner pour échapper aux regards de la foule indiscrète. Mais je n’en fus point encore quitte, et un petit guichet, pratiqué à plus de six pieds au-dessus du sol, servit d’observatoire aux enfants, montés les uns sur les autres pour contempler ma rare personne.

Les rives de l’Anapo, que nous suivîmes en allant à Syracuse, sont délicieuses de verdure et de fraîcheur.


Syracuse.

Mais voici que la mer se montre dans le lointain, et on aperçoit assise sur une langue de terre qui s’avance dans les flots, une ville que le guide appelle Syracuse. — Eh ! quoi, se demande-t-on en pénétrant par plusieurs ponts-levis dans une petite place de guerre isolée du continent et entourée de fortifications à la moderne, est-ce bien là Syracuse ? Qu’est devenue cette cité puissante qui s’étendait jadis sur un espace de sept lieues de tour, que Cicéron vante comme la plus grande des villes grecques et la plus belle de toutes les villes ? Hélas ! la majeure partie de la Syracuse antique n’est plus qu’un sol désert et couvert de débris ; le reste, resserré dans l’île d’Otygie, est un modeste chef-lieu de sous-intendance, où une population de 17 000 habitants semble se complaire dans un état de misère apathique.

La piété ignorante et grossière des modernes Syra-