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race toute différente, très-facile à assimiler. Vous en jugerez par ce que je vous ai raconté du roi Duong. Si singuliers qu’ils puissent paraître, tous ces détails sont très-exacts. Ils m’ont été confirmés depuis par un missionnaire, qui a passé trois ans dans le pays. Ajoutez, enfin, qu’au point de vue militaire, la position peut être considérée comme absolument inexpugnable. En établissant quelques batteries le long de cette rivière contournée, je ne connais pas de flotte qui puisse songer à y pénétrer, pour peu qu’elle ait à faire à des Européens.

Li-Kouan est reparti pour Phnompenk, en cochinchinois Namwang, sa résidence habituelle, à quelques lieues d’Udong, la capitale du Cambodje. Il devait remonter le fleuve Mé-Khom, caché dans la jonque d’un chrétien de ses amis. La citadelle de Saïgon, bâtie pour Gialong par un colonel du génie français, n’existe plus ; on l’a fait sauter. Nous n’avons conservé que les forts voisins de la rivière, qui restent confiés à la garde du commandant Jaurreguiberry. Ils sont entre bonnes mains. Soyez certain que le joyau de l’Annam, comme on appelle ici Saïgon et sa province, doué comme il l’est, par le sol, le climat et les eaux, pourrait être appelé à un grand avenir sous la domination française. Déjà les catholiques, très-nombreux dans le voisinage, accourent à nous de toutes parts. Grâce à leur concours dévoué, M. Lefebvre, évêque d’Isaroopolis et premier vicaire apostolique de ces régions, vient de jeter les fondations d’une école, d’un hôpital et même d’une église qui sera, sans doute, de longtemps encore, la plus belle de l’Indo-Chine.

J’oubliais de vous dire qu’au moment où nos navires furent signalés sur les côtes du Cambodje, une division de la marine annamite qui y stationnait, comme jadis la flotte romaine au cap Misène, se réfugia dans un des mille chenaux qui découpent le double delta des fleuves Mé-Khom et Saïgon. Nous ne pûmes l’y suivre faute de